Auto-production

Quartet colombien, Opensight nous propose avec « The Voice Of Nothing » son deuxième... EP. A quand l'album ? Non seulement les deux combinés donneraient une dizaine de titres pour trois quarts d'heure de musique, temps fort décent pour un album, mais de plus la maîtrise étalée le long de ces cinq plages, ici, montre un groupe plus que prêt pour cette étape.
Alors le groupe, d'abord, présentons-le. Il s'agit de Prog, mais pas trop typique : Hard Rock à la base, Rock dans l'approche, la matière première reste mélodique et concise. Quatre ou cinq minutes par titre, lignes mélodiques assez linéaires, Opensight ne peut être taxé de « grandiloquent ». La voix de Ivan Amaya vient de plus conférer une touche très personnelle au son du groupe, avec un ton froid à la Blue Öyster Cult convenant fort bien à la musique du groupe mais rarement adopté dans le monde du Heavy ou du Metal tout court (les exceptions, genre Virgin Steele, étant pourtant rarement décevantes). Le mixage relègue malgré cela souvent ce chant en arrière-plan et révèle peut-être un manque de conviction du groupe envers la pertinence de cette couleur vocale... à tort, je leur assure.
Une dernière caractéristique du groupe est que, si leurs racines sont toutes classiques (à côté du Prog, on trouve une grosse dose de Heavy traditionnel), leur son se tourne résolument vers quelque chose de moderne. Clair, sec, il privilégie les effets froids et tranchants, ce qui ne convient pas toujours au matériel... Ainsi, il ne met pas en valeur le caractère mélodique de « Former heroes », guère plus que le travail des guitares de « Only when ». Sur ce dernier titre, il réussit en revanche à marquer le rythme « haché » tout progressif, ainsi que l'alternance violence/douceur (peut-être trop) privilégiée par le groupe. Et surtout, il convient à ce chant, mordant mais léger, froid et piquant... qui différencie vraiment le groupe en rendant son son très particulier.
Sur « Former heros » par ailleurs la guitare colle à cette couleur sonore (voir l'intro), ce même son contrebalance efficacement le côté plus mélodique du titre, pour au final peaufiner cet effet de « violence fragile ». Je ne peux donc pas dire que ce choix sonore soit insensé. C'est, disons, un parti-pris. Le groupe en est sans doute conscient, transformant ici les claviers très modernes dominant le début du titre en ceux, modestes, soutenant le matériau beaucoup plus traditionnel obtenu sur le final. Fort appréciable.
Le groupe sait aussi délaisser ce parti-pris sonore à l'occasion, comme pour « Deleted scenes » où son absence sublime le caractère Heavy du titre simplement contrecarré par sa rythmique moins évidente. Et surtout il laisse l'ampleur nécessaire au développement de l'irrésistible partie instrumentale soyeuse enrichie de cette guitare quasi-jazzy... Tout aussi appréciable ! Celle de « Absolute truth » se distinguera aussi, mais dans le registre sonore évoqué plus haut, ce qui laisse à penser que le groupe ne manque pas de recul et n'hésite pas à remettre en question des éléments fondamentaux de sa formule... Cette élasticité lui promet de bons résultats !
Sur ce dernier titre, la guitare brille enfin en soliste et en fera de même pour « Skeptic's creed », morceau par ailleurs plus lent et lourd s'éloignant assez du standard Opensight. Les breaks y sont plus sonores que rythmiques et montrent la capacité d'Opensight à varier ses méthodes.
Autant de gages de qualité qui me font me demander ce que le groupe trouvait de gênant à enregistrer un vrai album. Avec ces ressources, cette personnalité, ces capacités d'adaptation et cette dynamique de perpétuelle évolution, toutes les conditions sont remplies pour faire mieux que ce que le groupe de Prog X propose d'emblée, à savoir un disque parfois haut en couleur mais trop vite réfléchi, ce qui au final ferme plus de portes à long terme qu'il n'en ouvre dans l'immédiat.

Le site : www.opensightband.com + myspace.com/opensight

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