A N D R O M E D A

" Manifest Tyranny "




A N D R O M E D A
Manifest Tyranny
Inner Wound Recordings

Le genre : intelligent mais pas chiant (comme quoi ça n'a rien à voir…)

Quand un gratteux suédois très doué est fan d'Europe et de rock progressif… Depuis leur tonitruante et juvénile entrée en matière en 2001 (Reinholdz, le compositeur, avait 21 ans) avec Extension Of The Wish, les progueux d'Andromeda (David Fremberg au chant, Johan Reinholdz à la guitare, Martin Hedin aux claviers, Linus Abrahamson à la basse, Thomas Lejon à la batterie) se sont fait un nom et une place sur la (pléthorique) scène prog-métallique. L'excellent The Immunity Zone de 2008 ouvrait une ère nouvelle pour le groupe, en matière de production et de renommée. Avec ce Manifest Tyranny, leur cinquième album studio (si on compte pour un seul la première version avec le chanteur originel et le réenregistrement d'Extention… avec Fremberg), le quintette suédois propose comme à son habitude une musique techniquement élaborée et mélodiquement recherchée, qui porte des textes engagés entendant dénoncer (en vrac) la guerre en Irak, la crise financière et la corruption. On y trouve ainsi régulièrement des morceaux de discours officiels intégrés à la trame sonore.

A l'écoute du titre (court d'à peine deux minutes trente) d'ouverture Preemptive Strike , on est frappé (c'est le mot) par la puissance instrumentale et le niveau de production : le son est énorme et très clairement défini, la section rythmique envoie du bois (dur) avec une caisse claire qui claque sévère et une basse ronflante, le son de gratte vous colle au plafond et la voix de David Fremberg est toujours aussi superbe. Mais ce titre est peu représentatif de l'ensemble de l'album : il se veut réellement une entrée en matière et ne dévoile donc pas d'emblée tous les atouts du groupe. On y retrouve la maîtrise technique insolente des suédois et leur goût immodéré pour les structures « pas simples », truffées de mesures composées, sans encore (ça viendra) côtoyer les astucieuses mélodies qu'ils savent judicieusement apparier à leurs rythmes complexes et breaks techniques. Ce qui pourrait laisser une décevante impression en demi-teinte ne dure pas car déboule le deuxième morceau (de choix) Lies R Us . Plus lent et lourd, ce titre est le premier temps fort de l'album, doté d'un refrain imparable à chanter sous la douche (profitez : Fremberg ne s'y envole pas trop donc c'est tenable).

Puis, à partir de la plage trois ( Stay Unaware ), on s'aperçoit que c'est tout l'album qui séduit par son remarquable équilibre entre puissance et modulation, entre rythme et mélodie. Un ensemble de haute tenue, fait d'élégance musicale et de maîtrise technique. Dissipons de suite un doute éventuel : jamais cette technique ne prend le pas sur la musicalité, les suédois se permettant même d'injecter de jouissifs plans de gratte d'inspiration très seventies (les relents Blackmoriens du solo de Lies R Us ) et des citations (dans l'esprit si ce n'est dans la note) du Floyd et d'autres gloires du prog' rock (le refrain de Chosen By God comporte une forte réminiscence Supertrampienne). Oui Manifest Tyranny est un grand disque, le digne successeur de The Immunity Zone dont il prend la suite sans redondance : ces mecs savent se renouveler ! Je reviens à l'incontestable réussite Stay Unaware  : put*** de groove ! Au-delà de ses arrangements (excellents) et de sa qualité d'exécution (exceptionnelle), ce titre démontre qu'on peut opiner frénétiquement du chef (tel un chien-chien de plage arrière) et taper du pied sur du prog ! Un joli pied-de-nez aux ronchons critiquant l'aspect parfois hermétique voire chiant de ce style de rock. Et que dire (si ce n'est s'extasier) des mélodies leads aériennes d'un Flase Flag ou d'un Chosen By God  ? Oui, ce guitariste est doué…

Les textes constituent le fil conducteur d'un album long qui réussit à ne pas lasser, grâce aux trouvailles mélodiques, aux arrangements (même Charlie Oleg est mis à contribution sur un Antidote au refrain purplesque   !) et aux renouvellements rythmiques ( Asylum ). Surtout grâce à la voix de David Fremberg, décidément un chanteur sensible, qui sait moduler et jouer sur plusieurs registres, du grave à l'aigu, du rugueux au suave. Porté et servi par des instrumentistes qui ne cherchent jamais à se mettre inutilement en avant mais mettent leur musique en valeur, Fremberg domine son sujet de la tête et des épaules, habitant ses chansons tel le Geoff Tate de la grande époque. La cohésion de groupe et une production subtile permettent à Andromeda d'installer (sans verser dans de longues périodes cicéroniennes pompeuses et pompantes) des ambiances variées ( Asylum ) et envoûtantes ( Survival Of The Richest , Go Back To Sleep ).

Les titres à retenir : Lies R Us, Stay Unaware, Survival Of The Richest, Chosen By God, Asylum, Go Back To Sleep (si j'ajoute Preemptive Strike, Antidote et le flippé Play Dead , vous avez l'album au complet !)

En conclusion. Assurément un des disques de l'année, Manifest Tyranny peut compter sur son intelligence de composition et ses qualités d'interprétation pour résister à l'épreuve du temps. Il consacre un grand vocaliste et des musiciens à la fois (sur)doués techniquement et inspirés musicalement. Andromeda progresse album après album et propose à chaque livraison qualité et nouveauté. Surtout, à l'instar des plus grands, ils réussissent le difficile pari d'allier un haut niveau d'élaboration instrumentale à une grande accessibilité. Bref si vous ne connaissez pas le groupe, ce cinquième opus studio est une excellente porte d'entrée dans leur univers musical, qui devrait vous inciter à vous précipiter ensuite sur Extension of The Wish et The Immunity Zone, à mon humble avis les plus réussis parmi les albums antérieurs. Si comme moi vous êtes déjà fans, je gage que vous ne pourrez qu'être ravis du cru 2011.

P.S. Qu'écrire de plus ? Si ce n'est qu'actuellement, l'unique menu de mon mange-disque se compose d'un couscous tunisien (avec harissa et petits raisins de chez Myrath), suivi d'un gros bout (Bouteil) de gruyère suisse (l'excellent live posthume de Steve Lee chez Gotthard) et de ce dessert suédois chaud-glacé.

Le site : www.andromedaonline.com + www.myspace.com/45986706

Bouteil Bout

 



 

   
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