KEN HENSLEY & LIVE FIRE

" Faster "

K E N   H E N S L E Y   &   L I V E   F I R E
Faster
 

Le genre : c'est dans les vieux pots…

Claviériste spécialiste de l'orgue Hammond, guitariste, chanteur, compositeur et producteur, Ken Hensley s'est fait connaître dans les années 70 au sein d'Uriah Heep (un personnage du David Copperfield de Dickens), formation britannique phare de la scène hard rock à tendance progressive. Ce groupe a souffert, en partie en raison d'un étiquetage abusif d'ersatz, de la comparaison avec Deep Purple et est, de ce fait, demeuré quelque peu dans l'ombre du mastodonte pourpre. Pourtant, sa contribution à l'évolution du rock vers un mariage blues/influences classiques et folk sur fond de musiques planantes est aujourd'hui évidente et, s'il ne jouit pas de l'aura d'un Led Zeppelin (principalement à défaut d'avoir réellement percé aux USA) ou d'un Purple, Uriah Heep est devenu une référence (toujours en activité d'ailleurs). La recette du groupe relevait de l'alchimie entre la guitare hard de Mick Box, les envolées vocales de David Byron et les influences progressives et folk d'un Hensley, dont l'approche mélodique de la composition fit beaucoup pour une musique dont on retient souvent les arrangements de chœurs. Quittant Uriah Heep en 1980, Hensley rejoignit le groupe de rock sudiste Blackfoot pour deux albums puis se consacra à la spiritualité et au mysticisme, via un nombre (certain) de paradis artificiels. Il a, depuis, participé à de nombreux projets, outre sa carrière solo et a opéré un intéressant come back en 2007, avec la mise en musique de son autobiographie, l'excellent Blood On The Highway, collaborant à cette occasion avec Glenn Hughes et Jorn Lande au chant (rhââ, lovely !).

Cette livraison 2011 le voit revenir de studio en force, accompagné de jeunes loups (comme Hughes en 1994) norvégiens. Le groupe Live Fire, actuellement composé de Tom Arne Fossheim à la batterie, de Sid Ringsby à la basse, de Ken Ingwersen à la guitare et d'Eiríkur Hauksson au chant, l'accompagne sur scène depuis cinq ans. De quoi s'agit-il ? D'une musique simple, mélodique et efficace. Très 70's dans l'esprit comme dans le son des instruments. On retrouve ainsi un hard rock façon Uriah Heep (pas étonnant, il en était le principal compositeur) mais aussi un côté très Deep Purple (la voix d'Hauksson y est pour beaucoup, tant on jurerait parfois entendre Ian Gillan), des titres hard groovy rappelant le Whitesnake première époque (la place laissée à la basse renvoie à l'alchimie qui existait entre Moody, Marsden et Neil Murray au début des 80's) et des sonorités qui peuvent faire penser à Bowie (période glam). Bref, du petit lait pour les amateurs de rock direct et très mélodique. Le style de gratte est jouissif, paraissant à la fois simple et évident. Toujours juste dans ses interventions lead , Ingwersen « colle » véritablement au style d'Hensley, immergé dans des compositions qu'il illumine brillamment.

Rien de très original mais tout est excellemment composé et concourt à faire remuer la tête et taper le pied en cadence. Le cœur de l'album renvoie au style de composition « historique » de Ken Hensley : mélodique, nostalgique et un brin folk-planant, qu'on reconnaît aisément dès les premières mesures d'un Slippin' Away (the Lover's Curse) . On peut reprocher la (relative) mollesse de titres comme At The Last Minute et Somewhere In Paradise (qui ont tendance à m'assoupir), la classique platitude d'un Faster qui ne mérite pas de nommer l'objet et l'aspect convenu des ballades. Il serait pourtant dommage de bouder les titres plus enlevés, réellement réussis. Donner l'impression de simplicité relève le plus souvent de la conjugaison de beaucoup de travail et de talent. Personne n'en fait trop sur cet album dont les ingrédients mélodiques et rythmiques sont savamment dosés et la majorité des flèches tirées ici atteint le mil. Une jolie réussite pour un vieux routier (sympa !) du rock qui, décidément, revient sacrément en grâce à l'âge de sagesse.

Les titres à retenir : Le titre d'ouverture, Set Me Free , mêle très efficacement ambiance puissante et lourde et détails sonores (Haré Krishna) à un solo de wha dantesque. The Curse est une composition assez typique d'Hensley, avec refrain tout en chœurs, qui débute par un balancement à la Whitesnake et s'achève dans un martèlement de batterie à la Child In Time , trouée d'un break planant qui lance un solo guitare/claviers mélodique et plaintif comme on n'en fait plus (de peur du ridicule) sauf que là, ça le fait ! La belle ballade I Cry Alone joue à cache-cache avec nos références stylistiques : intro à la Gary Moore (période bleue), couplets déclamés à la Meat Loaf et refrain presque crooner. Katrine s'amuse avec ses influences : le chant est pourpre et profond (c'est Gillan, non ?), le groove est reptilien et blanc (ça vient de chez Coverdale, c'est ça ?) et le refrain très Heepien (ben ça alors…). Beyond The Starz , tellement « so 70's » qu'on pourrait la croire extraite de la B.O. de Phantom Of The Paradise, avec des intonations « barytones » à la Bowie et une gratte toujours aussi inspirée dans son style « néo-rétro » manque juste d'un final qui pète. Fill Your Head (With Rock) remet un peu de coco sous la selle (les deux titres précédents fleurant la panne sèche). En bonus, un classique du Heep, Circle Of Hands , grandiosement interprété avec le Norvegian Radio Orchestra, prend une dimension digne de Salisbury (autre grand classique).

En conclusion. Venez nombreux vous chauffer au feu vivant de Ken Hensley (oh ! mysticisme, quand tu nous tiens). Faster est un album à l'ancienne, organique, créé par un grand shaman de la composition et interprété par d'excellents musiciens. Fort d'une production impeccable au son rond et chaleureux, plein de belles harmonies vocales et de plans guitaristiques hyper mélodiques, il ravira les amateurs de rock hard. Les aficionados du B3 en auront pour leur argent et tous ceux qui ont craqué pour le Heep, Purple, Whitesnake y trouveront leur compte également. Ca finit par faire du monde lorsqu'on ajoute (forcément) les fans du maestro plus les mélomanes ayant apprécié l'alliance de maturité et de fraîcheur de Blood On The Highway. Ainsi que, simplement, les amateurs de bonne musique pop, artisanalement composée et jouée sans excès de prétention.

P.S.1 Heep, Heep, Heep, hourra ! (Ouais, je sais… mais je n'ai pu m'en empêcher.)

P.S.2 Beurk, la pochette ! Non, je ne pouvais pas m'empêcher non plus de râler un peu…

Le site : www.ken-hensley.com

Bouteil Bout

 

   
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