Q U E E N S R Y C H E

" Dedicated To Chaos "
QUEENSRYCHE
Dedicated To Chaos
Loud 'n' Proud Records

Je ne pense pas trop m'avancer en présentant le 12 e Queensrÿche studio comme l'album qui rebutera le plus de fans. Certes, le groupe a toujours donné dans le Prog le plus novateur et changeant, mais jamais ils n'ont proposé quelque chose d'aussi déroutant que « Dedicated To Chaos ». Cela fait maintenant 30 ans que le groupe existe, Loud ‘n' Proud vient de les signer, et ils fêtent cet évènement en publiant quoi ? Operation Mindcrime III ? Non : plutôt Operation… Dancefloor.

Bon, ce n'est peut-être pas de la Dance, mais cet album est moderne. Pop, électro, tout ce que vous voulez, sauf Queensrÿche. C'est un pari de géant que relève le groupe, et le résultat est fort incertain. Il y a de l'idée, certes. Il y a du risque relevé aussi, il y a des surprises, de l'inattendu… mais le choix se révèle difficilement défendable au final. Pourtant, tout était très bien pensé, cela se voit clairement à l'écoute du tracklisting : le disque s'ouvre par quatre pistes identiquement modernes, Pop, appuyées sur une section rythmique telle que n'en a jamais connu le groupe (je me laisse même à supposer que Eddie et Scott sont pour beaucoup là-dedans tant leur présence dans les crédits est grande). Les choses qui frappent le plus sont la voix Pop Rock de Geoff et l'omniprésente basse surtout. Cette pâte de base est enveloppée de sons électros comme « Hot spot junkie » ou de motifs hindous comme « Got it back », mais l'idée directrice derrière ces titres est claire. On est plus chez Beck que Queensrÿche.

Les deux titres suivants, sans rompre, varient cette formule qui est déjà (oui) devenue lassante, en y ajoutant des arrangements originaux pour « Higher » (orchestrations, sax et solo de guitare surprenant – oui il y a encore des traces de guitare !) ou flirts sonores Indus pour « Retail therapy » avec moins de bonheur (ce titre à lui tout seul montre comment le pari du groupe était plombé d'avance, tellement ce sens rythmique est incompatible avec la lourdeur naturelle de Queensrÿche). On se voit ensuite proposer trois titres au son extrêmement homogène et jurant avec le début : c'est une volonté manifeste d'étoffer leur idée. Réel courant d'air au milieu des 16 titres (12 pour la version dépourvue des bonus), « At the edge », « Broken » et « Hard times » font preuve de réelle innovation sonore (qui me fait penser à « No Quarter ») et marquent une pause dans cette course effrénée au modernisme (la seconde quittant même toute structure rythmique pour notre plus grand bonheur). Pourtant le groupe les inclue bien dans son concept, et y pose bruitages, chant actuel, même basse moderne et sax (pire : deux de ces titres font partie des bonus, ce qui montre bien que Queensrÿche considère cet intermède comme un à-côté).

Le reste ressemble fort à une ligne droite : les titres invariablement actuels s'enchaînent, selon les mêmes principes, mais en proposant toutefois une référence plus light à la Pop, et se contentant de rechercher l'actualité, quelle qu'elle soit (fut-ce le Neo Metal que les vocaux de « I take you » semblent timidement évoquer, voire le R&B que « Wot we do » caresse dans le sens du poil). Que ressort-il de cette deuxième moitié d'album ? la même détermination à se mettre brutalement à la page, toujours dans la même vision globale (bruitages, hindouismes de « I believe » ou « LuvnU »), avec peut-être juste un minimum de variété (sonorités de guitare 70s sur « I believe », Glam sur « LuvnU », toutes les deux en fait des bonus, les 90s sur « The lie »)… « Big noize » semble conclure avec une note plus Prog, mais nous laisse sur le même scepticisme.

Le groupe avait une vue très claire de ce qu'il voulait, c'est indéniable, mais les moyens sont décevants : tout est emprunté, et surtout à des genres auxquels le groupe n'entend rien. Peu de choses fonctionnent, beaucoup sont factices (inutile de mettre des « LuvnU » et autres « Wot we do » dans tes titres, Geoff), et le songwriting n'est pas au niveau pour un tel défi… « Get started » peut faire l'affaire, mais un simple premier morceau d'album aurait suffi pour relativiser les choses avant d'attaquer un album plus sérieux. Par sérieux, je n'entends pas plus travaillé – car « Dedicated To Chaos » l'est – mais mené par autre chose que l'angoisse de ne pas se répéter. L'on est dans l'un de ces tristes cas où l'on a envie de dire : ils auraient mieux fait de se contenter de Mindcrime III.

Le site : www.queensryche.com  + myspace.com/queensryche

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