Frontiers Records

Après avoir officié cinq ans pour Gamma Ray et quatorze pour Primal Fear, Ralf Scheepers décide, lassé de son statut de voix Heavy allemande, de former un groupe de Néo-core et d'adopter un chant Death... Pas crédible ? En effet, c'est pas demain la veille que Ralf chantera autre chose que du Heavy traditionnel de nos grands-mères. Alors, pourquoi un album solo ?

La question se pose, l'album étant son premier en solitaire depuis ses débuts en 1983 tout de même. En fait, elle se pose depuis apparemment 3 ou 4 ans, Ralf ayant composé depuis 1997 pas mal de titres écartés des albums de Primal Fear . Alors, que va faire Ralf ? Et bien il va en faire ce disque bien nommé « Scheepers ». Et comment va-t-il s'y prendre ? Et bien en s'entourant de Magnus Karlsson, Alex Beyrodt, Matt Sinner, … mais dites-donc, c'est pas le line-up de Primal Fear ça ? Mais si, mon bon monsieur ! Ne serait-ce la batterie tenue ici par Snowy Shaw de King Diamond et Therion. Et vous trouverez même deux titres composés avec l'ex-membre de Primal Fear Stefan Leibing !
Et ça joue quoi tout ce beau monde ? Ben la pochette dit tout, je pense : c'est lourd, c'est burné, Ralf tend les biceps, couleur acier sur la photo, arborant son beau tatouage Primal Fear... Et, vous comprenez, il a eu peur que tout cela ne suffise pas à faire de « Scheepers » un disque assez Scheepers, alors Kai Hansen est aussi de la partie, pour jouer sur « Pain of the accused », un morceau vraiment prenant ceci-dit, aux arrangements exceptionnels...

Car, pour peu qu'on n'attende pas de Ralf aussi révolutionnaire que mon Néo-core growlé, on en a tout de même pour son argent. Les parties de Kai sont ici particulièrement soignées, et font de ce morceau un temps fort de ce disque. Mais, évidement, vous êtes désappointés, ce n'est pas assez Metal n'est-ce pas ? Ralf se trahit Alors voici que débarque Mike Chlasciak (guitariste de Halford) pour poser un solo Heavy en diable sur « Locked in the dungeon » qui ouvre le disque... Évidemment ça ne suffit pas, on n'est pas encore assez convaincu que c'est du Heavy, la guitare n'y suffit pas, alors Tim Owens va poser sa voix sur le titre suivant, la bien allemande « Remission of sin », comme ça, après ces deux titres jusqu'à l'apparition de Kai, on est sûr d'avoir affaire à du Heavy, hein ?
Bon à part tous ces invités/garanties Ralf se débrouille bien tout seul, en proposant du Heavy, du Metal, et recyclant autant Gamma Ray que Primal Fear... « Remission of sin » est un bel exemple de cette écriture « écologique ». Sinon, Ralf est particulièrement en voix, et la voix en question me donne la curieuse impression de ne pas vieillir avec le temps... étonnant. Juste quelques signes de fatigue peut-être, sensibles sur « Locked in the dungeon » par exemple. Et une tendance certaine à concurrencer Halford sur le plan des hurlements, déjà sur « Locked in the dungeon » où apparaissait Mike. Sur « Before the dawn » en revanche, il ne fait pas du Rage malgré la présence de Victor Smolski. Ah oui il y a encore du monde... mais j'abrège (ne reste plus à citer que Sander Gommans de After Forever).

Sur ce dernier titre, plus intéressant, il se charge de tout à part ce solo, je veux dire tous les instruments ! Sa voix contrebalance bien la légèreté de la composition et, évidement, c'est elle qui est à l'honneur ; mais vous serez étonnés de voir comment il se débrouille avec l'instrumentation. Cette voix, donc, que j'ai décrite quasi-intacte, lorsqu'elle ne Halford-ise pas, à l'occasion de « Locked in the dungeon » ou du très Speed « Play with the fire » (et qu'elle ne « Gamma Ray-ise » pas comme pour « Compassion »), ne se repose pas : elle se plait à varier ses timbres, adoptant une couleur brisée pour « Cyberfreak » ou « Saints of the rock », et modelant richement ses intonations sur « The fall ».
« Saints of the rock », vous l'aurez deviné, est un hymne aux 'talleux, de même que « Dynasty » d'ailleurs, car il faut que les textes confirment la musique : Heavy Metal is the law. « Saints of the rock » est bâtie en forme d'hymne, assez réussi d'ailleurs, et musicalement les hommages au Metal traditionnel sont incessants : « The fall » est presque 80s et le reste n'est pas loin...
Pour autant vous avez deviné un Ralf plein d'enthousiasme et ça va se ressentir : il fait des efforts en proposant une ballade (c'était « Before the dawn ») et un morceau acoustique, « Compassion », à l'instrumentation étonnante (banjo et accordéon !). Et même sur les morceaux traditionnels on aura un « Back on the track » moins linéaire, et quelques changements d'ambiances comme « Doomsday » aux arrangements un peu Sympho.

Mais pour le reste, traditionnel ou pas, Ralf s'en sort. « Cyberfreak », « Pain of the accused » et pas mal de titres parmi les plus Heavy sont de franches réussites. Il ne se pose guère de questions mais du moins maîtrise-t-il son propos. Alors, que dire devant un disque pareil ? Il n'y a pas une once d'originalité, pire, tout est déjà vu, mais ça fonctionne si bien... même les vieux moteurs peuvent ronronner plus puissamment que les neufs. Ne soyons pas trop exigeants, et contentons-nous du Heavy de Ralf, tant qu'il a autant la forme.

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