« Gut-Scrapers » déjà, les « racleurs de boyaux ». Evocateur… Autant dire que ça commence bien. Les évocations sonores associées sentent bon, et vous ne serez pas déçus, croyez-moi. Cinq Nîmois ayant créé ce groupe en 2008 avant de mettre en boîte une démo et jouer avec Manu Livertout (qui apparaîtra d'ailleurs sur « Gimme Your Soul »), puis enchaîner des premières parties de Lords Of Altamont, Sinsemilia, Fatal Picards ou Crucified Barbara… mais ils le méritent, je vous dis. Bon, peut-être pas pour les Fatal Picards ou Sinsemilia car on joue dans un autre registre musical.

Ici, on est vraiment dans le Rock, et dans le meilleur sens du terme. Dix titres de pur Rock traditionnel, hargneux et rocailleux, servi par des guitares crachant riffs et accords avec une classe toute suintante de sueur et de muscle. L'écriture est très habile, l'interprétation authentique et chaleureuse, servie par un habile dosage de poigne et de savoir-faire mélodique… La recette parfaite en quelque sorte. Gut-scrapers nous offre un disque sans temps faible – je dirais même un bel enchaînement de titres montant chacun d'un cran en hargne et en dureté. Le son peut être parfois maigrichon, mais ce n'est que partie remise car nul doute que le groupe n'en restera pas là.

L'ombre noire au tableau – réglons ça de suite – est le chant de Thierry Pitarch peu consistant sur le fond, bien que dans un esprit parfaitement Rock'n'roll. Peu importe, les titres envoient quand même. Entamons : « Cheers motherfuckers », simple Hard Rock 90s servi en apéro, « Gimme your soul », plus pâteuse, traversée d'une belle partie instrumentale, plus authentique en fait, « Be on the ball », et voilà un parfum ricain, 70s, ça s'enrichit… « Take me away », le rythme s'alourdit, pour notre plus grand plaisir… les soli s'énervent, le refrain grossit. On commence déjà à l'accompagner, d'ailleurs… terriblement efficace. On déboule sur « Angry », sublimé par le double solo Livertout / Godin, mais la compo elle-même est encore un cran au dessus des précédentes : une sacré intro démarrant au quart de tour et mariant habilement des deux guitares, puis une rythmique au hachoir, à l'ancienne… Le premier titre vous faisait attendre un disque Hard Rock de plus comme il revient de mode, convenu, mais en une moitié d'album vous avez balayé bien plus de ressources, influences et inspirations différentes que vous ne vous y attendiez.

La bonne nouvelle est que chaque titre de la seconde moitié va procéder avec autant de brio, ajoutant sa pierre à l'escalier : d'abord « Take them off », plus sombre, plus musclée, aux guitares plus dépotantes aussi, plus 90s, « Got no life », vrai Hard 90s pour le coup, excellente composition extrêmement bien arrangée avec ses harmonies, ses parties instrumentales et son final déterminé. Thierry fait ce qu'il peut et gueule avec une hargne non feinte. « Burden », retour aux USA avec ses superbes Slides, mais en plus musclé, « Thumbs up », toutes guitares dehors, groove de plus en plus profond et refrain encore plus efficace… vous chantez toujours, d'ailleurs. Et vous finissez sur « You suck » qui, si le son est toujours franchement Rock, tient plus dans l'esprit du Metal… Vous avez balayé 10 titres sans qu'aucun ne se répète, chacun apportant sa pierre à un édifice inspiré et plein de sens, de goût, de maîtrise stylistique et d'authenticité indéniable.

J'ai déploré le coffre limité de Thierry, pourtant aussi mordant qu'un bouledogue dans l'esprit, et le relief sonore trop modeste. Il s'agit néanmoins de faiblesses extrinsèques purement pratiques qui ne demandent qu'à être corrigées, et non de facteurs propres au groupe et à sa vision musicale (enfin, pour ce qui est du son, OK, mais m'en fous je reste optimiste). Bref, « Gimme Your Soul » est l'un des disques français qui m'aura fait le plus headbanguer cette année, nul doute là-dessus, qui m'aura fait le plus sincèrement plaisir et satisfait à la fois, une des bonnes surprises les moins attendues mais les plus complètes.

Le site : www.gutscrapers.com  + myspace.com/gutscrapers

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