DEMANDE A LA POUSSIERE Quiétude Hostile

My Kingdom Music


 

Alors mieux vaut vous prévenir : ici on écoute un album post blackmetal tendance apocalypse teinté de doom, que cela soit dans la lourdeur des riffs de guitare ou dans les paroles très noires, entre dépression et vision du monde décolorée. Peut-être réussirez-vous à entrevoir un rai de lumière dans cette œuvre, mais seulement entouré de noirceur et de teintes de gris. L’espoir n’est pas vraiment au rendez-vous.

Second album du groupe, Quiétude Hostile se conçoit comme un concept album sur les tourmentes de l’âme, sur la lourdeur de la vie telle qu’elle peut être vécue dans le monde moderne. Très sombre de part en part, partant de la douleur ressentie au quotidien, de la souffrance induite par des pensées noires voire morbides.

Cela débute avec le titre Léger goût de soufre, qui résonne telle une supplique avec son son très lourd, très oppressant, entêtant. Le texte annonce l’ambiance du reste de l’album : l’âme habite un corps qui n’est qu’une coquille, prisonnière et endolorie. Le chant est tantôt suppliant, tantôt rempli d’une rage inouïe.

Morphème est tout aussi sombre et le tutoiement vise directement l’auditeur. Tel un hymne à la douleur et à l’invasion par la tristesse, le morceau envahit le corps tout entier avec ses résonnances et son orchestration. Un peu de mal à trouver la signification donnée au morphème par le groupe (c’est selon les définitions du dictionnaire la plus petite entité du langage écrit, et quand on entend « … tu te crois mort mais les morphèmes te maintiennent en vie » , cela demande une réflexion quant au sens mis par le groupe sur cette définition.

Alors le clip d’Eréthisme (à voir https://www.youtube.com/watch?v=IIaKJ9zozvo ) est littéralement sublime. Les images, leurs textures, le noir et blanc teinté de gris, le visuel d’ensemble convient parfaitement au morceau, voire rajoute de la noirceur au son. Cela est parfaitement travaillé artistiquement et on ressent ce que le groupe a voulu exprimer. Le tout est exécuté avec un dramatisme cohérent, montrant la dichotomie entre la sensation de fièvre et l’immobilisme volontaire. Pour info, un éréthisme est un terme médical désignant un état d’excitabilité accrue d’un organe (Le Robert).

Le morceau suivant, Quiétude Hostile, insiste sur ce paradoxe : sentir la rage bouillir à l’intérieur et, extérieurement, montrer une passivité quasiment maladive. Le chant est d’ailleurs poussé au stade de rugissement, parfois entrecoupé d’un chant plus profond, plus lancinant. Le morceau est très lourd, très pesant et peut se résumer avec cet extrait « Rester inerte face aux ressacs de la simple bile contre nos dents ravalée dans le creux d’une quiétude
hostile. »

Perdu débute avec une guitare acoustique, cherchant à s’amarrer au titre et s’éloignant des morceaux précédents. On pense au début qu’il s’agit d’un instrumental. A la moitié du titre, il devient électrique et fait penser à un vieux Tiamat. Même s’il est joliment orchestré, on se sent perdu, en partie par l’apport d’une voix parlée féminine dont je n’ai pu retrouver la provenance… Puis ensuite arrive le chant, sobre, se rajoutant sur la mélodie très naturellement.

S’ensuit Bois de Justice, sous-titré l’échafaud, qui remet les pendules à l’heure. Plus doom, plus intense que les morceaux précédents, le texte tournant autour des sensations qu’on pourrait éprouver au moment de l’exécution de la sentence finale. C’est vrai enfin, ne pas pouvoir vivre sa vie comme on le désire profondément provoque des émotions paradoxales à la fin…

Une intro acoustique également pour L’oubli du contrasté, qui se poursuit ensuite avec un son de batterie qui tourne la tête. Le sujet du morceau est une forme d’éveil de la conscience, que de réaliser certains fonctionnements, certaines réalités apporte une forme de souffrance, qui loin de libérer complétement l’esprit, le contraint en partie à oublier. L’apport de voix parlée sur ce morceau ravive le ton de plainte, mais aussi de rage ultime.

L’album se termine avec le titre Expiravit (littéralement un dérivé du verbe latin expiro - 3ème personne - à la forme active, indicatif parfait - qui correspond à un passé simple ou un passé composé en français - et qui veut dire rendre l’âme, rendre son dernier soupir). Mis à part ce petit rappel latiniste, le morceau commence avec des cris d’appel, de l’enfer il me semble, suivis d’une symphonie en black metal majeur. Long de neuf minutes et quelques, Expiravit explore les tréfonds de l’âme et jusqu’où celle-ci peut errer, dans les méandres de la tristesse, telle un fantôme oublié, s’exprimant sauvagement. Le texte « Une éternité n’est rien, si l’inchiffrable destin, Conduit à errer tel un spectre, tout en influant sur d’autres êtres.
N’attendons-nous pas patiemment ce moment, Où pour un quelconque ressentiment,
Nous sera donné à notre tour, le droit d’influer sur ceux qui nous entourent. » résume on ne peut mieux l’ensemble de l’œuvre.

On conseillera l’écoute de cet album aux fans du genre, mais aussi à ceux qui apprécient les textes en français, tout à fait audibles sur ces albums. Huit titres d’une longueur non négligeable (plus de six minutes par titre), qui combleront les misanthropes qui sommeillent en chacun de nous.

Demande à la Poussière : Edgard Chevallier (guitares) ; Neil Laveugle ( guitare, basse) ; Vincent Baglin (batterie) Christophe « Krys » Denhez (guitare, chant)

Mon top 3 : Perdu ; Expiravit ; Eréthisme


Le site : https://www.facebook.com/DALPdoom/ + https://dalpdoom.bandcamp.com

xila


 

 
 
 
 

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