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 B L A C K F I E L D

2013



Blackfield IV est un tournant dans l'association Steven Wilson / Aviv Geffen, tant ce dernier devient maître de ce projet s'approchant dangereusement de sa carrière solo. C'est également lui qui le défendra devant la presse, dont UltraRock put faire partie, pour une interview… « cinématographique » : Après avoir « fait son cinéma » (4 changements d'hôtels en 24h, et pas des 1 étoile…), Aviv nous reçoit dans une mise en scène digne d'un film : presque en caleçon, regard hagard sous une tignasse peu engageante, chambre enfumée, au fond de laquelle gloussent quelques filles amies ou groupies allez savoir, bientôt rejointes par une sorte de Colonel Parker les entretenant de sujets aussi joyeux que la religion musulmane et les sociétés d'investissements… au mépris le plus total de notre présence. Aviv lui-même n'étant franchement pas enclin à bavarder, n'étant que moyennement anglophone et pas toujours facile à suivre – et s'occupant de surcroit autant de son portable que de nous – il va falloir batailler pour vous livrer quelques infos sur « Blackfield IV ».

(UltraRock) J'aimerais commencer par une question sur le nom de cet album, que tu as donc nommé « IV »… Est-ce une façon de le relier aux deux premiers Blackfield plutôt qu'au précédent, « DNA » ?

(Aviv Geffen) Pas vraiment. « DNA » était un album pivot, pour moi et Steven. « Welcome to my DNA », c'est « Welcome to Aviv Geffen » en fait, c'est l'album où j'ai cessé de me réfugier derrière Steven, où je me suis enfin mis en avant. C'est là que j'ai pris les rênes de Blackfield, en fait, et que j'ai tout pris en charge. Désormais je suis Blackfield, ça m'a pris du temps, et c'est peut-être pour ça que j'ai voulu reprendre la suite numérotée… Je continue à faire avancer le projet.

(UR) Blackfield est en effet de plus en plus Aviv Geffen : on y retrouve moins Steven Wilson, non seulement de façon concrète, mais également musicalement. Toi, vois-tu toujours Blackfield et ta carrière solo comme des entités bien distinctes ?

(AG) Blackfield me permet de m'exprimer en anglais, en fait, il me permet de m'adresser au monde et non seulement à Israël, Blackfield est essentiel pour ça. J'ai beaucoup écrit pour Blackfield jusque là, et j'en suis désormais l'auteur principal… en gros, Blackfield c'est moi, pas besoin de m'en cacher. Tu trouves que ça sonne comme mes disques solo de plus en plus, et c'est bien possible, mais ça reste quand même le son de guitare de Steven, nos deux voix, mes arrangements et mes claviers, ce mélange magique de sons. Il mixe encore, de plus, et l'album sonne incroyablement !

(UR) De l'autre côté, tu as sorti en solo ton premier disque anglophone… Ta carrière propre se rapprocherait-elle, elle aussi, de Blackfield ?

(AG) Oui, effectivement, j'ai sorti ce disque. C'est un nouveau pas pour moi aussi, je suis toujours Aviv mais j'avance, j'apprends à ne plus m'adresser au seul Israel mais au monde entier. Les israéliens n'ont pas les mêmes oreilles, et Blackfield me permet justement de moduler mon message pour le présenter au plus large public. Je fais tout pour ça, et c'est ainsi que j'ai pris le projet à ma seule charge. Je suis devenu Blackfield, maintenant je peux tourner avec U2, Placebo, et continuer à avancer.

(UR) Bon, sur « Blackfield IV », Steven n'est pas un simple producteur, et effectivement il y laisse sa trace quand même, surtout sur le son qui, de la même façon, je trouve, se rapproche de ce qu'il élabore pour ses disques solo… Tu l'entends aussi ?

(AG) On se donne mutuellement, oui. Mais on le fait instinctivement, je n'ai pas forcé Steven à sortir du monde du Metal. On se développe parallèlement tous les deux, je respecte son évolution de moins en moins Metal, je ne veux le forcer à rien. Nous fonctionnons comme de vrais amis, nous apprenons l'un de l'autre et nous échangeons, c'est ainsi que nous progressons plus ou moins dans la même direction, oui…

(UR) Mis à part Steven, trois autres personnes prestigieuses apparaissent sur ce disque… A qui doit-on leur présence, toi ou Steven ?

(AG) Pas du tout à Steven, non : Brett Anderson est là car j'ai toujours été très fan de Suede, je suis allé les voir aux quatre coins du monde, et aujourd'hui avoir Brett sur un disque de Blackfield, pour Steven aussi d'ailleurs, c'est une fierté. C'est un grand nom de la Pop, c'est un personnage très charismatique, un très bon chanteur et l'auteur de quelques monuments. L'avoir pour Blackfield est une grande affaire pour nous… Il n'a rien à voir avec le Prog [Blackfield non plus désormais pour être honnête] mais c'est une affaire de fans pour nous. Blackfield, après tout, nous permet de tels écarts avec nos carrières respectives.

(UR) J'aime particulièrement ce titre sur « Blackfield IV »[« Firefly »] car il finit par sonner comme un vieux Suede. On y trouve une sorte de noirceur qui tient à leur son…

(AG) Oui, c'est assez sombre.

(UR) Je t'imaginerais aisément avoir écrit le titre en pensant à Brett…

(AG) Non.

(UR) Dans ce cas Brett était un choix génial pour l'interpréter ! [quelques silences éloquents sans réponse…] Bien, parmi les autres titres, « Pills » est le premier que vous ayez livré, via son apparition sur l'édition spéciale de « Raven That Refused To Sing » de Steven un peu plus tôt. Pourquoi ce titre, qui est le moins représentatif du nouveau son de Blackfield ?

(AG) On n'a pas vraiment choisi ce titre, c'est K-scope, notre label, qui le voulait. C'est vrai que ça sonne comme du Blackfield traditionnel, il y a ce gros son, la guitare de Steven et mes orchestrations, et ces vocaux typiques… Quel titre tu aurais voulu voir, toi ?

(UR) Si j'avais à choisir parmi les 11…

(AG) Non mais ton préféré ?

(UR) Mon préféré est celui que je t'ai dit, « Firefly »… ce côté sombre digne de Suede me plait vraiment. Parlons d'autre chose : avant l'album tu as participé à une émission israélienne équivalente au « The Voice » anglais… Je ne sais pas ce qu'il en est chez toi, mais ici ces émissions sont très mal vues des musiciens… [il semble acquiescer] Ça n'a pas soulevé de polémique, chez toi ?

(AG) Si mais je passais Live, ce n'était pas une rediffusion donc on ne pouvait pas me couper. Ce qui m'intéressait était de parler non de musique mais de religion, de l'occupation [des territoires palestiniens]… J'ai pu m'exprimer, on a pu entendre mes idées, c'était génial.

(UR) Ces idées sont plutôt de gauche, donc…

(AG) Oui. [ce qui se conçoit clairement s'énonce brièvement, soit]

(UR) Et à défaut de controverse musicale, y a-t-il eu une controverse suite à leur exposition à la télé ?

(AG) Ils n'avaient guère le choix, lorsqu'ils m'ont engagé je leur ai dit « écoutez, vous m'entendrez m'exprimer sur tout ce que je pense ». Et j'ai parlé de choses dures. Il n'y avait pas de coupures possibles, les gens ont vu qui était Aviv Geffen. Et je suis passé à la TV grâce au succès de Steven : au bout de 15 ans nous avons réussi à faire de Blackfield quelque chose de vraiment gros. Ça a été du boulot.

(UR) J'ai une autre question qui remonte aussi dans le temps : j'ai appris que Steven avait acheté un appart' à Tel Aviv à une époque…

(AG) Loué.

(UR) Mea culpa. Il ne l'a plus, je crois… Mais je crois aussi qu'il n'a aucun parent israélien ou juif donc son installation là-bas ne pouvait être liée qu'à Blackfield, je pense ?

(AG) Il ne m'a pas parlé de parents juifs, il est venu à l'époque où nous étions réellement devenus amis. Il venait me voir à Tel Aviv à cette époque, et il s'est simplement pris un appart en ville pour pouvoir y être plus souvent. J'étais content qu'il le fasse.

(UR) Est-ce que ça a relancé la machine Blackfield, cette proximité ?

(AG) Non, car nous sommes de toute façon continuellement en contact, on se parle tout le temps, à n'importe quelle heure, que ce soit moi ou lui, on s'appelle quand on veut parler de n'importe quoi, que ce soit de sport ou de politique. C'est une vraie amitié et ça s'entend dans notre musique.

(UR) J'ai une question qui remonte encore plus loin dans le temps, à la création du projet cette fois-ci. Aujourd'hui, tout semble évident, votre proximité, votre relation qui explique son appart en Israel… mais au début, il a bien fallu entrer en contact et rien n'était moins évident pour Steven Wilson de Porcupine Tree d'un côté et un chanteur israélien de l'autre… Si je ne me trompe pas, tu as décidé de faire jouer Porcupine Tree en Israël alors que tu n'avais aucun contact avec Steven… comment donc en est-ce venu à la création d'un duo ?

(AG) J'ai voulu qu'ils jouent en Israël, car j'avais adoré « Signify » [1996], et je me suis alors employé à les faire venir. Et lorsque j'ai rencontré Steven je lui ai fait écouter mes chansons, en demo, et il m'a dit « Woah, Aviv il faut faire écouter ça à plus de monde que tes seuls fans en Israel ». Il a du aimer ces titres, voilà pourquoi nous avons monté Blackfield.

(UR) Accessoirement, Porcupine Tree a-t-il effectivement joué en Israel suite à ton initiative ?

(AG) Oui ils sont venus, j'ai tout arrangé et ils ont pu jouer ici.

(UR) Et Blackfield remontera-t-il sur scène, lui, maintenant que Steven te l'a en quelque sorte laissé à toi seul ?

(AG) C'est même déjà prévu, nous jouons ensemble en février.

(UR) Je pensais que ça allait être plus compliqué… Des dates en Angleterre ou toute une tournée ?

(AG) Une tournée, avec une vraie implication de Steven, à la guitare et au micro.

(UR) A la date d'aujourd'hui, que penses-tu d'un « Blackfield V » ?

(AG) Je pense que ça se fera.

(UR) Et c'est forcément un peut tôt pour y penser mais l'envisages-tu avec plus de Wilson ou encore moins de Wilson ?

(AG) J'espère qu'il sera plus présent, car il aura fini son prochain album solo. Il a aimé « Blackfield IV » et il continuera l'aventure.

Zut, si Steven aime l'album, le prochain risque d'être dans la même lignée et décevoir ceux qui, comme moi, trouvaient le projet prendre une tournure moins intéressante… Une mauvaise nouvelle m'ôtant le courage de continuer à tirer les vers du nez à un Aviv décidément moins causant qu'une carpe. Le personnage est intriguant. Il n'aura malgré tout pas été possible de vraiment le découvrir un tant soit peu, mais il nous aura intrigué. Le concert annoncé – le 6 février au Trianon – est tout aussi intriguant avec son annonce de « Blackfield feat. Aviv Geffen » avec Steven en… invité spécial.

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