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C  Y  L  E  W


Interview réalisée par M@x Born, le 1er décembre 2017 à Paris
 

C'est bien à l'abri, dans la réserve  discrète du Hard Rock Café parisien que nous avons rencontré Arno, membre et producteur du groupe CYLEW. Tombé très tôt dans la grande marmite musicale, il nous livre ci-dessous son parcours et celui de son groupe :

 

UR : Comment prononce t on le nom de groupe ?

Arno : Cyliou

A quel âge as-tu commencé à t'intéresser à la musique ?

Très tôt car mon père qui est mélomane m'a bercé aux Beatles, aux Stones mais aussi à AC/DC et à des choses un tout petit peu plus violentes, enfin le violent de l'époque. Mon père m'avait découpé une silhouette de Stratocaster dans du bois, j'avais six ans, et le premier truc que j'avais essayé de faire a été de clouer des scoubidous pour faire des cordes (rires).

Et ça marchait bien ?

Pas du tout, mon père m'a dit que je faisais un peu de peine et m'a acheté une guitare classique, j'ai donc commencé à jouer à six ans, j'ai pris des cours et, à dix ans, j'ai eu la chance de rencontrer en sixième au collège quelqu'un qui était batteur. On s'est demandé ce qu'on pourrait bien faire le samedi au lieu d'aller jouer au foot et nous avons commencé à faire de la musique. C'est à ce moment-là que cela a vraiment démarré.

Que la guitare ?

Oui que la guitare au départ.

Tu joues de la basse sur l'album.

Le noyau dur du groupe est un trio, en live on emmène un bassiste avec nous

Ton papa t'a donné l'impulsion, quels sont les groupes qui t'ont donné envie d'aller plus loin ?

Dans l'ordre, Led Zeppelin, Metallica, Guns'n Roses et surtout Metallica quand j'ai vu la vidéo qui accompagnait le Black Album, je devais avoir onze ans quand il est sorti, j'ai vu cette vidéo dont la première partie se passe en studio et je me suis dit qu'il y avait un gars en plus avec eux, qui touche des boutons, des manettes, qui leur dit quoi faire, qui structure les morceaux, c'est un peu un chef d'orchestre dans le rock'n roll, je me suis intéressé à ce métier et très vite je suis allé vers ça.

Tes passions te suivent jusque dans tes études

Voilà, et j'ai fait une école d'ingé son, suis devenu ingé son en continuant à jouer énormément de guitare

C'est ton métier aujourd'hui ?

Oui ingénieur du son et producteur de disque. J'ai eu la chance de travailler avec un certain nombre de gens, de produire le premier album de Deportivo, le dernier album des Wampas, j'ai mixé des albums.

La musique c'est donc ta vie, à quel moment tu rentres dans le projet CYLEW ?

Fin 2005, il y a déjà 12 ans, via Myspace, je suis tombé sur une certaine Cylew qui avait sa page et des compos. J'ai trouvé ça assez bien foutu, une bonne voix, un bon accent, je ne la connaissais pas du tout humainement mais nous avons commencé à engager la discussion et j'apprends qu'elle fait ses démos toute seule, qu'elle a un petit groupe qui l'accompagne de temps en temps, qu'elle a grandi à Los Angeles. Nous avons commencé à collaborer sans trop y croire et puis elle se met à chercher un bassiste, je n'avais pas de groupe, mon travail me prenant beaucoup de temps, je lui ai dit que je pouvais essayer pour dépanner. Bizarrement, cette même année j'avais fait un album avec le groupe de Chris, deux ans plus tard quand notre batteur nous a quitté et je lui ai demandé de nous rejoindre. Chris a un gros passé en tant que lead singer au sein du groupe Magic, fin des années 90.
C'était pourtant toujours Lady Cylew en tant que projet solo. Nous avons fait le deuxième album Black Lace Prophecy essentiellement elle et moi, à l'aide de petites machines mais avec une dominante assez rock, Chris a participé mais de loin pour des raisons d'emploi du temps. Au fur et à mesure des concerts, nous nous sommes rapprochés tous les trois, soudés et nous sommes devenus un groupe. En décembre 2013, entre Noël et le jour de l'an, nous sommes rentrés en studio pour voir comment nous pouvions interagir ensemble sur des jams enregistrées, des titres sur lesquels nous avons travaillé pendant trois ans.

Il s'est passé beaucoup de temps entres les deux albums

Oui, c'est trois ans en cumulé, il fallait faire en sorte que les plannings coïncident, ça s'est fait par sessions d'une semaine à deux semaines tous les deux ou trois mois. Ca donne un travail de production sur l'album de six mois, ce qui est conséquent par rapport à un éventuel budget que pourrait allouer une maison de disques

Tu t'es donc chargé de la prod

Oui, de l'enregistrement au mixage jusqu'au mastering

C'est simple pour toi d'avoir la casquette de compositeur et de producteur ? Sais-tu exactement où tu veux aller ?

Alors je pense que je sais où je ne veux pas aller, ce qui est déjà pas mal. Ce disque est vraiment produit à trois, Lady Cylew nous a ramené ses chansons et, chacun installé derrière son instrument, nous jouions le morceau en changeant accord, tempo, grille. Nous nous sommes vraiment pris la tête à dégager les bons riffs, les bons patterns de batterie, le bon tempo. Ensuite seulement nous enregistrions. 80% des prises de batterie sont les premières prises live, 70% également pour les parties de guitares rythmiques. Nous avons privilégié le fait de pouvoir les jouer en concert ou en acoustique. Ça permet de s'adapter aux salles, de s'adapter aux problèmes de nuisances sonores en France ou à Paris où les gens se plaignent du bruit. C'est le cas de beaucoup de salles à Paris. Pour éviter le bruit, il y a la campagne :)

Justement parlons d'isolement, les textes de Motel sont très tournés vers la relation avec l'autre, ce Motel c'est un refuge ?

Ce Motel c'est surtout une étape, le track listing est organisé comme un road trip, et pendant ce voyage tu t'arrêtes où ? Dans un Motel, tu changes d'état, aux Etats-Unis bien sûr, d'émotions, il y a des chansons qui ont clairement une signification. Like You est un titre où on parle d'enfants soldats mais…

Il y a plusieurs niveaux de lecture

Voilà. Jupiter's Crash parle de toutes ces personnes qui voudraient te contrôler, faire de toi ce que tu ne veux pas. Western Sky est le tout premier titre que nous avons mis en boite

J'ai bien aimé Outer Spaces avec cette voix très brute, très proche, la voix qui est mixée très en avant sur cet album prend tout son sens sur ce titre

C'est vraiment l'effet recherché

Sur la chanson Save Me, les paroles Save Me From Saving You, on ressent toute la difficulté à maitriser une empathie excessive, c'est l'appel à la compréhension de l'autre sur ce que l'on est.

Oui. Jusqu'à quel point, sommes-nous capables de sacrifier notre bien être pour celui de quelqu'un d'autre parce que tu aimes cette personne ? Un ami, jusqu'à quel point tu peux aller avant de te dire stop ? Ça peut être parfois trop tard.
Un exemple à la con pour dédramatiser un peu, quelqu'un t'invite à danser mais tu ne sais pas danser... c'est vraiment un exemple à la con (rires).
Plus tu grandis, plus tu prends de l'âge et plus tu contrôles ton empathie, ne plus pouvoir sauver les autres ne fait pas de toi une mauvaise personne, c'est légitime d'abandonner.

Ce sont les propos de quelqu'un d'intelligent, qui fait passer dans sa musique des choses pas évidentes à dire au quotidien.

Oui c'est bien ça, l'art quel qu'il soit est très souvent une thérapie, c'est une façon de sortir les choses. Je parle pour moi également à la guitare, si j'ai rien à raconter, je ne vais pas faire de solo, ça ne m'intéresse pas, ce poste est peut être mieux que chanteur pour ça.

J'ai retrouvé dans votre album le spleen du grunge et le côté très urbain du Neo Metal, j'ai pensé à Evanescence dans l'approche de la mélodie

Ça a été vraiment naturel, on ne s'est jamais posé de questions sur la direction à suivre. De par nos âges, nos expériences d'enfants des 90's. Tous les exemples que tu as cités nous ont nourris.

C'est un road trip pas très joyeux, on y ressent une vraie gravité

Oui oui, c'est lié aussi à notre époque qui est un peu grave, on n’est pas un groupe revendicateur mais nous soulignons que l'actualité nous touche, la tendance est à fermer les yeux sur les trucs moches, s'apercevoir que le monde va mal uniquement quand des gens sont tués dans une salle de concert, c'est un vrai problème. Entendre des jeunes dire qu'on vit très bien avec le Sida aujourd'hui, c'est pas possible. Le monde n'est pas rose et nous ne vivons pas dans une époque douce. On essaie d'en parler en gardant une distance, on ne va non plus être déprimé, au contraire, nous essayons d'apporter du plaisir aux gens, c'est pour ça qu'il y a des titres moins graves, dans Save Me il y a un contraste entre le texte et la musique. Il y a un titre des Foo Fighters, Walk, qui est sur l'avant dernier album, le texte est dur mais la musique est happy et encourageante, j'aime bien ce genre de contrastes.

Le site : https://www.cylew.com/

M@x Born

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