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R A G A R A J A



Interview réalisée par Doro’, au Café Dunkerque, Paris le 10 Octobre 2019.
 

Nous avons rencontré Rãgarãja quelques heures avant la soirée privée qui présentait « Egsophère », leur premier album. Un échange avec passion, simplicité et bonne humeur !


Bonjour merci de m’accorder cette petite interview.

Euryale : Merci à toi de faire vivre la scène Metal française. C’est pas évident et c’est super cool de votre part [les médias].

Pouvez-vous me présenter Rãgarãja en quelques mots et ce que vous faites dedans ?

Euryale : Comment présenter ça de façon réaliste ? En fait il y a un dictateur, moi. Je m’appelle Euryale et je suis à la base du projet. Je compose principalement et j’écris les paroles. Puis je me suis mis à enregistrer, à faire le mix et faire les clips donc tout va bien, j’ai pas de temps libre (rires). Je fais pas mal de trucs mais ça se démocratise de plus en plus. Je délègue de plus en plus de choses parce qu’on commence à être de plus en plus une équipe. L’album nous a soudés et nous a de plus en plus rapprochés.
Je m’occupe globalement des choses et à côté on a Chris, à la guitare, qui fait aussi pas mal de graphisme, qui nous aide beaucoup à ce niveau-là. On a Stan, notre barman qui, lui, est un peu plus chargé de faire de la communication avec le tatoueur ou d’autres structures histoire de nous diversifier. On a forcément Léo à la batterie…

Forcément ?! (rires)

Euryale : Forcement il en fallait un ! (rires) On a eu beaucoup de mal à trouver notre batteur. On en a changé beaucoup parce qu’on on s’est pas senti à l’aise avec tous, mais on a quand même gardé une bonne expérience parce que ce sont des gens qui ont partagé des choses avec nous, donc il n’y a pas de regrets. Mais là on a trouvé « la » personne vraiment. Je le kiffe de ouf, c’est mon copain (rires).
Bref, il est batteur mais il s’occupe aussi du booking avec Arnaud, notre manager qui est là-bas, et pour moi c’est essentiel d’avoir une personne qui s’occupe de vendre notre projet. Puis on a Fabien à la basse, qui compose un peu. C’est lui qui a fait l’intro de l’album et le premier morceau, quasi intégralement parce que j’ai juste mis les paroles dessus. Comme je l’ai enregistré je me le suis un peu approprié (rires).
On va intégrer un peu plus de ses compos dans les temps à venir. Il s’occupe pas que de ça d’ailleurs, toute la partie web c’est lui aussi. C’est-à-dire toute notre diffusion, notre distribution web, etc… c’est vraiment lui qui est chargé de ça. En fait au début je faisais tout, tout seul, avant mais maintenant je me consacre essentiellement à la production et à la promo.

C’est que de l’auto-production en fait…

Euryale : C’était pas de l’autoprod’ sur le premier EP car on est passé par un studio d’enregistrement, on a travaillé avec Amaël du groupe Novelists. C’est un excellent batteur et on est passé par lui pour le premier EP. Puis on est passé sur l’album, qu’on a fait nous-mêmes. Ça a pris 2 ans car forcément l’enregistrement de l’album, le mixage, le mastering ça ne s’apprend pas comme ça. Je me suis saigné les oreilles pendant 2 ans sur cet album. Maintenant à chaque fois que je l’écoute, je vois tous les défauts alors que toi tu vas dire « Mais il est très bien cet album ». Toute production a des défauts, c’est des choix. En fait à partir du moment où tu fais des choix, tu mets en défaut les choix que tu n’as pas faits.
Si je devais choisir un album à emmener avec moi sur une ile déserte, ce serait mon album que j’essaierais de remixer indéfiniment (rires). Donc voilà un peu comment le projet s’articule. On essaie vraiment de faire beaucoup de choses par nous-mêmes parce qu’il y a un dicton qui dit « Donne un poisson à quelque qui a faim il mangera une fois, apprends lui à pêcher et il mangera toute sa vie ». On a appris à faire les choses par nous-mêmes pour être autonomes le plus artistiquement possible.

Quand avez-vous commencé à faire de la musique ?

Léo : Ça fait un bon bout de temps, depuis mes 5 ans et je ne faisais pas encore de batterie. J’ai commencé par de la percussion basique et j’ai fait du clavecin pendant bon nombre d’années donc rien à voir. J’ai commencé la batterie à mes 15 ans et là, ça a vite pris une partie de ma vie. Maintenant, c’est carrément ma vie complète, c’est mon métier, je ne fais que ça, à base de 5 heures par jour. Il y a d’abord eu une grosse ascension vers le Metal. J’ai d’abord commencé par du Rock, Hard Rock, etc… comme beaucoup de gens dans le milieu du Metal je pense, puis c’est monté jusqu’à Meshuggah, Gojira, Lamb Of God etc… qui m’ont inspiré pour repiquer quelques parties batterie pour Rãgarãja. Voilà mon histoire.

Euryale : La mienne est ultra rigolote. D’abord je suis nul en musique. Quand j’ai démarré le chant j’étais vraiment nul, j’ai mis longtemps avant de savoir chanter. J’ai mis 2 ans avant de savoir jouer en rythme et clairement j’avais un problème avec le rythme. Tout ce que j’écrivais ne collait pas avec les rythmes et j’ai appris plus tard que c’était des mesures composées.
Je me suis mis au conservatoire de moi-même vers mes 12-13 ans et j’ai commencé la musique sur une erreur. On sortait d’un concert d’un groupe du nord qui s’appelle Marcel & son orchestre, qui est un groupe de Rock festif. Je devais avoir 12 ans et mon frère devait en avoir 9, et dans la voiture au retour mon frère a dit à mon père « Hey papa ! Si on faisait un groupe de Rock ! » et il est parti bille en tête, il a fait « Ok ». C’est le plus nul bassiste de l’univers (rires) mais il a appris la musique à 35 ans avec nous, mon frère s’est mis à la batterie, moi à la guitare et après je suis parti dans le Metal quatre ans plus tard.
En même temps j’ai été éduqué à AC/DC, Guns’n’Roses, Les Berruriers Noirs, Ska-P, Nirvana… c’était mes premiers albums. Les Rolling Stones, les Beatles, tout ça, ça me fait ch*** (rires), c’est mou. J’aime bien les musiques qui ont du chien, qui accrochent. Très vite j’ai un côté Punk. Je préfère les Guns à Mötley Crüe parce qu’il y a un côté Punk dans les Guns qu’il n’y a pas dans Mötley. Oui du coup, ma carrière de musicien a démarré sur une erreur (rires).

Et donc de là, vous avez créé Rãgarãja, un groupe au nom imprononçable. On dirait le nom d’un animal exotique (rires).

Euryale : (rires)

Léo : Alors c’est exotique oui mais c’est pas un animal.

Euryale : C’est une divinité. Le Rãgarãja, dans la mythologie Hindoue, c’est le Roi des Passions dans sa forme irritée. A la base quand j‘ai créé ce projet, je voulais créer une colère froide, une colère contenue, une colère qui te fait réfléchir, qui te fait produire, qui te rend créatif. Parce que je pense que le Metal c’est ça : c’est de la colère créative. J’ai choisi ce roi des passions, parce que les passions c’est ce qui nous anime. Je ne voulais pas nécessairement un nom à tendance politique, je voulais vraiment avoir quelque chose axé sur les passions, le ressenti, le feeling. Je suis assez content de ce nom. Au début, je voulais le changer pour Sulfure, c’est un nom que j’aime bien aussi. Peut-être que ce sera le nom d’un album, on verra. Tiens tu as une exclu ! (rires)

A propos d’album, vous êtes actuellement en promo pour « Egosphère ». Comment appréhendez-vous sa sortie ?

Léo : On espère vraiment voir notre public à la release party d’aujourd’hui et celle du 2 Novembre, au Bus Palladium. C’est un album chanté en français, qui s’adresse à un public Metal francophone. On défend le Metal français, on est fiers de beaucoup groupes de la scène Metal française. On essaye clairement de s’inscrire dans cette scène. On espère fédérer une communauté autour de cet album, voire autour de la scène Metal française.

Euryale : J’ai envie que les gens aiment le Metal en français. On a la chance d’avoir en France des groupes de Metal qui déboitent comme, par exemple, Gojira, Mass Hysteria, Sidilarsen, The Arrs, Eths… Je me suis donné une mission, c’est mon chemin de croix, de diffuser du Metal français. J’ai envie que tu écoutes notre musique et que tu te dises «  Ah tiens c’est en français mais ça m’a pas dérangé, ça m’a même plu ! ».

J’ai envie que les gens aient ce ressenti-là, je n’ai pas envie qu’ils soient gênés. Mon objectif avec cet album là c’est de faire aimer le Metal français aux gens. Beaucoup de groupes ont essayé et n’ont pas encore trouvé de recette, je ne prétends pas qu’on va la trouver, je ne m’attends pas à ce qu’on fasse de miracle, mais en tous cas j’apporte ma pierre à l’édifice et peut-être qu’un jour il y aura un groupe qui sera au sommet de cette pyramide, même si ce n’est pas nous. A mon avis, ce sera pas nous (rires), mais ce n’est pas grave, on aura travaillé pour ça. J’ai envie d’incarner ce que Rammstein incarne en Allemagne. Rammstein c’est l’Allemagne dans la musique, dans les textes, dans tout. J’ai envie d’avoir cette énergie-là, cet élan, cette volonté.

C‘était quoi la question de base ? Parce que ma réponse était longue (rires) et je me dis que j’ai peut-être loupé une dimension (rires).

Sur la sortie pure, on a déjà la chance d’avoir une petite communauté de fanatiques qui connaissent les paroles et qui nous suivent en concerts. Déjà leur faire plaisir à eux, ces gens qui prennent le temps de vivre ton art, de le vivre profondément. Après je pense qu’on a vraiment envie de passer un tournant, de devenir une référence, parce qu'on peut le devenir. J’arrêterai ce groupe là, ce projet, ce nom là, ce concept, quand je serais mort. C’est de la résilience et de l’obstination pure. Voilà, tu n’as plus de questions (rires).
De plus, on a de la chance d’être distribué par Season of Mist, par l’intermédiaire d’Ellie Promotion, qui est notre attachée de presse, qui est vraiment quelqu’un d’extraordinaire.

Ah si j’en ai encore ! (rire). Vous sortez l’album en format numérique et physique. Vous êtes plutôt pour ou contre les formats digitaux ?

Euryale : J’aime le format physique. Ça sonne mieux. Je vois la différence parce que je l’ai mixé. Un disque sonne mieux qu’un format numérique, c’est beaucoup plus agréable à écouter.

Léo : Je préfère aussi le format physique, en tant qu’objet. L’objet entier qui présente l’artwork, le livret… on perd ce côté-là en numérique.

Euryale : On l’a fait en digipack, qui nous a couté une blinde, avec un livret dépliable. On voulait le faire pour ceux qui ont envie d’avoir un bel objet entre les mains. Pour nous c’est important. On est tous un peu fétichistes de quelque chose et je pense que c’est important de rester fétichiste d’un CD. Le numérique va disparaitre quand internet disparaitra, le CD disparaitra plus difficilement.

Le numérique est quand même en plein essor depuis quelques années…

Euryale : Ah oui bien sûr ! Mais tu vois, je connais une fille qui est modèle, je lui ai demandé dans quelle agence elle est. Elle m’a répondu « Je suis modèle sur Instagram » donc le jour où Instagram s’arrête, tu n’es plus modèle. Le jour où Deezer et Spotify s’arrêtent, tu n’es plus musicien. C’est une aberration. Moi je ne veux pas de ça, je veux avoir l’objet sous les pattes. Au moins pour moi, pour mon plaisir égoïste.

Léo : Je pense qu’il y aura toujours des gens qui seront attachés à l’objet.

Euryale : En plus on a de la chance car on va le distribuer dans les Fnac et dans tous les réseaux via Season of Mist, à partir du 1er Novembre. On a cette chance là et on a envie de s’ancrer dans le physique le plus possible. Pour nous c’est important. D’ailleurs ce soir on fait une soirée de lancement, on aurait juste pu faire un évènement Facebook, mais on a préféré faire une soirée pour optimiser le boulot de notre guitariste qui est barman, va préparer des cocktails spéciaux à l’effigie de Rãgarãja. On va se prendre une murge à la Rãgarãja mais on va la prendre tous ensemble. On a envie de rester dans le réel, c’est important. Le numérique c’est bien mais ça rends dépressif si on reste trop dessus.
L’animation des réseaux sociaux est bien sûr importante aussi mais il y a deux choix : on a fait le choix du jeu concours qu’on propose là [rdv sur la page Facebook du groupe pour en savoir plus]. On a fait le choix de donner quelque chose aux gens et non pas aux structures. Par exemple, au lieu de mettre 200€ dans la promo Facebook on s’est dit « Ok on va faire un jeu concours et celui qui gagne remporte 200€ de tatouage ».

Léo : Et là ce sera bien concret, ce sera sur sa peau (rires).

Euryale : Ce sera bien physique oui (rires) après on ne décide pas du tatouage, on ne va pas lui imposer notre logo. Ceci dit ce serait stylé d’avoir un fan qui soit assez hardcore pour ça. Mais en vrai au début j’étais très axé sur le numérique, le premier EP on l’a fait en numérique et on s’est dit que la vie c’est les gens et le contact humain. J’ai envie d’utiliser le numérique et l’orienter vers le contact humain et pas l’inverse.

Vous pensez que ce contact humain manque ces dernières années ?

Léo : C’est un oui catégorique absolu ! Je viens d’un milieu plus « Noïse » où les concerts se passent dans des caves parisiennes où on est 200 dans une pièce où on devrait être 70, et où il y a de la transpiration et tout ça. Ça fait du bien ! C’est de la chaleur humaine, ça pogote, il y a des bières qui volent dans tous les sens. Malheureusement aujourd’hui on ne peut pas faire que ça je pense, travailler sur l’imagerie et le son numériques.

Euryale : Tu dois le faire parce que c’est là qu’est ton propos artistique. Tu peux le faire qu’en physique et en dématérialisé, mais à la fin celui qui transpire sur scène et dans la fosse, il existe et on a envie qu’il continue d’exister. On peut être 200, 20, 8 ou 3 dans une salle, même un mec tout seul… Si j’ai ce mec là, tout seul devant moi, mais qu’il kiffe notre concert, je m’arrête pas de jouer. Parce qu’on aura fait plaisir à une personne dans sa journée. Je trouve que ça a plus de valeur de faire plaisir à une personne en vrai qu’à 100.000 personnes à distance.

Léo : C’est sûr que je préfère pas bouffer un jour un repas numérique (rires).

Euryale : La côte de bœuf numérique ! (rires). Imagine la tronche de la sauce ? (rires). Vous reprendrez bien un peu de résistance après ça ? Non merci ça ira, j’ai eu suffisamment de processeurs pour la journée (rires).

A propos de réalité, quels seraient vos meilleurs souvenirs sur scène ? 

Euryale : J’en ai plein ! On a ouvert pour Hacktivist il y a trois ans. Très gros souvenir, très grosse ambiance, les gars d’Activists super saucés. Je les adore donc forcément très bon souvenir. Mon premier soutien-gorge reçu sur scène fait partie de mes meilleurs souvenirs. C’est très gratifiant. Mon premier concert avec mes parents quand j’avais 14 ans, puisqu’on était un groupe de Rock familial donc très bons souvenirs aussi. Et avec le groupe, il y a eu un concert où j’ai vu trois personnes au premier rang qui connaissaient mes paroles, qui ne se connaissaient pas entre elles et qui se sont tenus un peu bras dessus, bras dessous, et qui se sont mis à chanter les paroles. Si bien que les versions live que je faisais aux voix habituellement, je ne les ai pas faite là mais j’ai fait la version CD parce que je savais très bien que ce qu’ils voulaient c’était ça. Et je me suis senti flatté d’avoir un mec au premier rang qui gueulait mes paroles, avec moi. Je me suis vraiment senti bien, je me suis dit « Il y a un mec qui m’a lu ! » (rires). Je pense que c’est ça mon meilleur souvenir de concert.

Léo : Déjà il y a la date avec Smash It Combo, j’adore ce qu’ils font. Sinon des souvenirs, j’en ai notamment un où il y a eu des pogos sur scène, des plongeons de slams depuis la scène, c’est agréable à voir. Quand le public monte sur scène avec toi et qu’il plonge dans la fosse après, c’est génial à voir !

Euryale : Je me souviens d’un concert dans une salle, Léo n’était pas encore dans le groupe, c’était une salle qui ressemblait à un tube pas très large et les gens se battaient dans la fosse. C’était même pas du pogo, c’était de la bagarre. Et ça c’est cool. Ça fait peur, t’as pas envie de t’en prendre une, t’as pas de scène parce que t’es en face des mecs, c’est de la sueur…

Léo : Il faut vivre des expériences un peu fortes dans la vie, casser la routine…

Euryale : Ça casse aussi des mâchoires mais bon… mais je vais pas tous les jours à l’hôpital, c’est bien, ça casse ma routine (rires). J’y ai fait deux semaines à cause d’un clip, j’ai loupé les matelas sur le premier EP. On filmait un clip pour le morceau qui s’appelle « Ma chute libre », j’ai sauté de 4 mètres de haut et j’ai loupé les matelas. J’ai eu 36 heures de coma artificiel, et j’ai enchainé des moments de réanimation… J’ai survécu, c’est Rock’n’roll ! J’ai eu de la chance en vrai mais je le referais, je mettrais plus de matelas autour, mais je le referais (rires).

Du coup Max, tu es plutôt plateau de tournage ou plateau de concerts ?

Euryale : Je ne peux pas choisir. Parce que je réalise les clips et j’aime ça. J’aime vraiment encapsuler une idée, une sensation… Pour moi c’est de la poésie visuelle. J’ai besoin de ça. J’ai besoin du plateau de tournage et j’ai besoin de la scène. Pour moi le plus drôle ce serait de filmer un live. Faire un clip avec du monde autour, qui vient participer, faire vivre le clip… Ce serait nos fans les plus hardcore. Mais choisir entre l’un des deux c’est impossible, c’est comme choisir ente le vin et le fromage (rires).

Léo : Moi c’est le live, c’est clair. Mais on ne peut pas comparer ce qu’on fait Max et moi, dans le sens où lui il fait des clips et pas moi. Je figure seulement dans les clips donc c’est complètement différent.

Euryale : Je ne suis pas vraiment réalisateur. Je n’ai pas de formation pour ça. Tu me mets devant une caméra, je ne sais pas comment l’allumer. Par contre je mets en scène, je décide du cadre, des lumières… J’ai des super techniciens avec moi notamment un qui s’appelle Lex de Fiction Maker, qui nous a fait les deux derniers clips. J’ai besoin de mettre la main à la patte pour sentir le truc. C’est devenu comme le mixage et le mastering, ça fait partie de la démarche artistique. Je préfère me définir par ce que je fais plutôt que parce que j’existe. Pour moi l’action me définit plus que le reste.

( Euryale s’adresse à Léo) : On a complètement détruit l’ordre de ses questions. Je vois sa feuille là, c’est dans le désordre total. Mais elle a le sourire aux lèvres donc ça me fait plaisir (rires).

Qu’est ce qui t’influence le plus dans la compo des morceaux ?

Euryale : J’avoue que je suis très ermite. J’écoute du Metal, mais peu, j’écoute plutôt de la Funk. Pour me détendre ou passer du bon temps j’écoute Nile Rodgers, un artiste de Funk extraordinaire. J’écoute peu de Metal au final même si j’ai des influences car ça va m’influencer et mon approche de la musique va être biaisée, et je risque de vouloir faire ce que les autres font. Je m’acharne à essayer de trouver un autre style, de faire quelque chose qui n’existe pas vraiment. J’ai du mal à trouver des influences dans ce que je fais, il y en a qui les trouvent mieux que moi. Quand j’écris, je m’inspire plus de ce que je traverse, ce que je vis, d’idées, de concepts ou de choses comme ça. D’observations aussi. Typiquement pour « Sarcophage », qui est un morceau qui parle de la sensation que ça fait d’être sorti de son corps, d’être à la frontière entre deux états, entre la vie et la mort, la frontière d’être un homme ou être une femme, même simplement se sentir enfermé dans son corps. Je me suis dit qu’il fallait que j’essaye d’imaginer cette sensation et de l’aborder.

Pareil pour « Premier souffle », le morceau qu’a écrit Fabien, le bassiste, qui compose un peu du coup. Ce titre a été dédié pour son fils qui venait de naitre, et on a essayé de savoir comment on se sentirait à ce moment-là, quelles étaient nos envies à ce moment-là précis. Donc j’ai écrit un texte sur ce thème-là. Je me base pas trop sur les films, je préfère prendre des éléments de la vie.

Léo : Alors que moi, à l’inverse, j’ai plutôt mangé du cover à blinde, j’ai repiqué pas mal de batteurs qui ne viennent pas forcément du Metal, mais aussi du Jazz, domaine dans lequel j’ai fait trois écoles différentes. Le cinéma prend une place dans ma vie monumentale également. On peut dire que je construis mon jeu par rapport à ceux d’autres batteurs qui m’inspirent.

Par rapport à cette idée de sortir de son corps, si demain vous vous réveilliez dans le corps d’une femme, quelle serait votre première réaction ?

Euryale : Je vérifie si c’est vrai que les filles ne font pas de bruit quand elles vont aux toilettes. Non pour de vrai, le premier truc que je fais, je m’envoie en l’air pour voir ce que ça fait. C’est une autre mécanique, une autre machinerie… J’y vais ! Et le deuxième truc que je fais, je vais me servir à bouffer parce que franchement un changement de corps comme ça c’est que j’ai dû subir une opération assez lourde et je pense que j’aurais les crocs. Voilà, baise et bouffe. Je suis un peu beauf là (rires).
A part le physique, ça ne changerait rien. Je ne changerais rien du tout à ce que je fais d’habitude. J’imagine pas qu’un mec et une nana puissent vivre de façon différente, pour moi c’est juste deux enveloppes différentes. On kiffe certains trucs différemment, mais ça ne changerait rien. Je continuerais de vivre. Ah si ! Je mettrais une paire de talons pour comprendre à quel point c’est casse-gueule (rires). Je les mettrais 15 minutes dans la rue pour voir et après je rentrerais chez moi pour revenir aux Converse.

C’est malheureusement la toute fin de notre entretien. Avez-vous un dernier message à transmettre à nos lecteurs ?

Euryale : Sortez de chez vous ! Si vous finissez de lire cette interview, fermez votre ordi, sortez dehors, marchez, prenez 30 minutes pour vous, lâchez votre téléphone, lâchez vos écrans et vivez pour vous. C’est un peu ça d’ailleurs le message de l’album, « Egosphère » c’est ce qui nous enferme. On est enfermés dans notre propre ego. Déplacez votre ego, oubliez votre ego numérique et vivez. Allongez-vous dans l’herbe et écoutez.


Le site : https://ragaraja.bandcamp.com

Doro'


   

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