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 S T I C K Y   B O Y Z

2013



Les Sticky Boys sont de ces groupes géniaux à interviewer : d'abord, parce qu'on les aime bien ; ensuite car de tels groupes, on en cherche en France ; encore ensuite car ils sont sympa. On a beau être à l'étroit dans cette sale du Dr Feelgood, le courant passe de suite avec Alex Kourelis, guitariste de la formation, accompagné de son batteur Tom Bullot, étrangement venu en patins à roulettes… faut pas chercher à comprendre, c'est les Sticky. Attablons-nous autour d'un verre pour évoquer « This Is Rock'n'Roll », cet électrique premier album, dont le clip « Miss Saturday night » tourne justement sur l'écran du bar. Alex nous donne la réplique l'esprit décidément bon enfant mais la voix aussi puissante que devant un micro.

(UltraRock) Première question : pourquoi ton batteur est en patins à roulettes ?

(Alex Kourelis) Euh… bah je crois qu'il adore ça en fait ! Je saurais pas l'expliquer, moi j'en ai jamais fait de ma vie, j'ai jamais ressenti le besoin d'en faire… Ça me perturbe aussi hein ! Il y a du avoir un traumatisme… c'est un sujet tabou je pense qu'on va éviter d'en parler. C'est un peu gênant d'ailleurs là ! J'ai les mains qui deviennent moites…

(UR) OK. Je vais proposer une question plus sérieuse, parce que j'en ai quand même… Beaucoup de gens vous ont vus pour la première fois dans cette pub pour la SNCF… Or là-dedans vous êtes quatre ! Vous étiez un quatuor avant d'être un « power trio » ?

(AK) En fait, c'était la volonté de la SNCF, notamment du réalisateur, qui voulait un truc assez bougé, assez poussé… C'est pour ça qu'on est grimés un peu à outrance, et il voulait, pour un effet un petit peu plus dingo, avoir un 2 e guitariste, factice en fait. Donc on a simplement appelé un pote, qui s'appelle Lucas, qui est venu, qui fait pas plus de gratte que ça, et qui n'a d'ailleurs pas bronché sur le truc. Ils lui ont loué une double-manche exprès pour en rajouter des caisses, et il fait le zigoto comme il le peut, voilà... On s'est dit on a un plan rigolo, alors plutôt que de se ramasser un mec qu'on connaît pas, qui va pas nous amuser, autant prendre un copain qui est bien rigolo tout simplement !

(UR) OK vous n'avez jamais envisagé d'avoir 2 guitares en fait ?

(AK) Non non, pas du tout.

(UR) Alors à part cette pub, l'autre coup de pouce dans votre lancement ce fut deux rencontres, dont la première avec Nashville Pussy…

(AK) Bah Nashville c'était assez bref en fait. Euh… tu vas me parler des Donnas j'imagine derrière, ou pas ?

(UR) Logiquement oui  J

(AK) Ah, bah très bien ! [2 groupes de nanas, tiens… petits cochons]

(UR) Tu veux faire d'une pierre deux coups ?

(AK) Bah non, j'ai des dons de voyance en fait, je suis assez medium. Euh… non, Nashville Pussy en fait c'est très bref, c'est juste qu'au moment où on démarchait pas mal autour de notre musique, on a eu des échanges avec eux, voilà, qui ont juste simplement trouvé notre son cool, et qui nous ont donné de bons encouragements, donc c'est resté virtuel en fait. Et on est restés un peu en contact derrière, et ça s'est tenu à ça. Pour les Donnas en revanche, elles avaient fait un concert à la Maroquinerie il y a quelques années, et on était restés boire des bières derrière, on avait rencontré les nanas avec qui on s'était bien marrés, et on avait notamment bien sympathisé avec la bassiste Maya Ford, qui nous avait d'ailleurs dépannés à la basse sur une des premières démos du groupe à l'époque où on n'avait pas encore notre bassiste actuel. Et on est restés en très bon termes et en contact avec cette fille-là depuis. Même si les Donnas commencent actuellement à calmer un petit peu le jeu, et font comprendre qu'elles en avaient un petit peu marre…

(UR) La démo que tu évoques là c'est ce 2-titres qui circule, et dont le 1 e morceau s'est retrouvé sur l'album ?

(AK) Euh… non ! Ça, c'était encore une démo avant. Celui-là, le 2-titres, a été enregistré dans un petit studio à Châtelet à Paris, qui était tenu par Bastien Burger [bassiste pour The Do entre autres] et François Maigret – dit «  Shanka » – qui était avec No One Is Innocent à l'époque, voilà [Destruction Inc. Studio, du nom de leur projet commun]. Non non à cette époque-là on avait déjà recruté notre bassiste… Ça s'est fait vite hein, car on a dû recruter le bassiste en avril 2009 puis on a dû entrer en studio en juin ou juillet 2009 pour faire ces deux titres-là en fait. Il fallait avoir un support pour démarcher à droite et à gauche. C'était important pour nous d'avoir un support avec le bassiste actuel, sachant en plus que les compos avaient déjà évolué.

(UR) Le recrutement du bassiste, à ce que j'ai vu, s'est déroulé étonnamment vite…

(AK) Ouais, ça s'est fait très vite… En fait c'est marrant parce que, avec Tom le batteur, on joue ensemble depuis 10-12 ans, on a énormément de projets, énormément de groupes où ça n'a jamais concrétisé, au moment d'entrer en studio, au moment de faire les concerts, où ça commençait à rouler, on s'est toujours cassé la gueule parce que les mecs ne suivaient plus, les mecs n'avaient plus envie, donc voilà on a essuyé vraiment beaucoup de plâtres… Et à un moment donné on s'est retrouvés tous les deux on s'est dit « qu'est-ce qu'on fait, on arrête ou on repart à zéro ? »… On s'est dit « aller on repart à zéro mais c'est la dernière ». Et on est partis en se disant « on n'en a rien à foutre, on fait ce qui nous passe par la tête »… on n'avait jamais chanté ni l'un ni l'autre, et on s'est lancé là-dedans ! Il n'y avait que batterie-guitare à l'époque, avec du chant à deux… ça nous a ouvert des portes assez rigolotes, à la fois chez les Punks et à la fois dans un truc un petit peu plus branché, parce que c'était la grande époque des White Stripes et tout ça. Donc c'était une formule qui était assez séduisante, comme ça, et en fait très vite le son s'est affiné, on s'est rendu compte qu'un bassiste, il nous en faudrait un quand même et que c'était bien… Et là on s'est dit : on pose une annonce, on cherche avant tout un musicien avant un pote, pour ne pas faire l'erreur qu'on faisait avant, et puis on verra bien ce qui se passe, si le mec vient là juste pour jouer et qu'il se casse après on n'en a rien à foutre, on lui dit ce qu'il a à faire et puis – on était dans l'optique un peu TGV, quoi ! Et le premier mec qu'on auditionne, c'était le 3 e frangin de la bande, quoi, c'est vraiment marrant, parce que le jour où on a décidé de prendre un zikos avant de trouver un pote, en fait on a trouvé les deux directement. Voilà, c'était vraiment fou… c'est cool ! Très très bien hein, très très bonne surprise. Et ouais ça a été vite, du coup.

(UR) Pour une surprise c'en fut une bonne. Vous trouvez la pub de la SNCF dans la foulée… comment se fait-il qu'un groupe si neuf trouve une telle opportunité si vite ?

(AK) Bah ils nous ont contactés. C'était sur myspace à l'époque : un jour on a un mail qui apparaît et c'était un message de la SNCF qui nous proposait un plan pour une pub. On a relu le truc à trois fois, on dit « tiens, qu'est-ce que c'est que cette histoire ? c'est curieux quand même »… On les a au téléphone… bon, on a su plus tard qu'ils avaient eu 2-3 groupes avant nous et qui avaient refusé le côté fun et un peu trop décalé, avec cette histoire de costumes et maquillage. Nous ça nous faisait marrer, le projet nous éclatait, et on s'est entendus sur la réalisation, sur ce que ça pouvait nous donner en rendu aussi final, et puis voilà on n'a finalement pas hésité très longtemps… Le projet était drôle, on a été super-bien drivés, très pro, très bien pris en charge, et puis nous ça nous a énormément aidés, notamment le financement, il y avait ça aussi, bah pour l'enregistrement du premier album.

(UR) Donc ce sont eux qui vous ont contactés, après avoir contacté d'autres groupes ?

(AK) C'est eux qui nous ont contactés ouais.

(UR) Tu penses qu'ils cherchaient un groupe qui n'avait pas peur du côté un peu trop Glam, qu'ils n'arrivaient pas à trouver ?

(AK) Peut-être ça, et puis le côté décalage, il fallait assumer de faire un truc sans se prendre la tête en fait, c'est ça. Nous, le second degré, on l'a, on est capables de revenir sur ce qu'on fait et de rigoler… Voilà, on s'est dit autant saisir l'opportunité et puis derrière on n'a pas regretté puisque ça nous a offert un belle carte de visite. Avant l'album on a eu une présentation vidéo à filer, même si ce n'était pas exactement ce qu'on était sur scène, ça nous a ouvert des portes de concerts, de salles, et c'est ce qui nous a permis de jouer au Hellfest en 2011… Voilà, on a été contactés par ça … Non, c'était un bon coup pour nous, une bonne visibilité, et une très bonne expérience.

(UR) Aujourd'hui vous jouez un genre de Hard Rock qui revient peut-être en force dans des pays comme la Suède mais qui est encore bien absent de la scène française… D'ailleurs, voyez-vous une quelconque scène correspondante ?

(AK) Je saurais pas te dire… Il y a une espèce de retour au Rock'n'Roll quand même en France, actuellement, une espèce de petit milieu quand-même… On ne se rend pas forcément compte, c'est vrai qu'à force de traîner dans les bars à droite à gauche, d'aller en studio, tu rencontres des mecs qui sont issus du même milieu que toi aussi… C'est pas un problème qui date d'aujourd'hui : culturellement, c'est pas un style qui a toujours été représenté en France, à la radio c'est pas une musique que t'entends… Tu vas en Allemagne, tu te réveilles le matin et tu entends du AC/DC ou du Status Quo et c'est banal… Tu as Lordi qui ont fait l'Eurovision en Finlande, tu as des choses comme ça qui se passent… et tu as Volbeat aujourd'hui qui vendent des millions de disques au Danemark et qui sont toujours numéro 1 des ventes dès qu'ils sortent un truc, et ils sont en train de gagner toute la Scandinavie… Voilà, ça n'arrive pas aujourd'hui en France. Pourquoi ? je sais pas mais c'est une musique qu'on n'entend pas, en tout cas sur les médias généralistes.

(UR) Ce qui est étonnant est que ce vieux Hard Rock peut quasiment être considéré comme une mode, en Scandinavie…

(AK) Ouais ouais c'est une grosse mode quand même, ça tourne énormément. Moi je sais pas quel a été le déclic là-bas, comment ça a fonctionné, mais on n'a pas ça chez nous. Voilà, ça j'en suis sûr.

(UR) Bien, on a parlé de la pub SNCF, mais vous avez fait celle pour Converse dans la foulée ! Comment avez-vous rempilé ainsi ?

(AK) La même chose : ils nous ont contactés directement. Alors là je pense que c'est parce qu'ils ont réussi à retrouver nos coordonnées… grâce à la SNCF ; et puis par l'intermédiaire d'un pote interposé qui, lui, avait dû faire une pub pour Converses qui avait avorté il y a quelques mois de ça. Et finalement, ils avaient un nouveau projet qui était celui-là, donc ils voulaient un groupe qui jouait pour la fête des mères, qui présentait un petit peu son projet musical à la maman guindée et puis bourgeoise pour un petit peu des décalages et surprises… Et à la base ils cherchaient avant tout un groupe parce que ça leur facilitait le travail, plutôt que d'avoir un groupe qui compose la chanson et qui en contrepartie aurait fait du playback, des comédiens auraient joué les scènes. Et nous ils nous ont proposé de faire la totale. Donc, là encore, on s'est très vite entendus avec l'équipe – bon c'est une équipe de jeunes qui était à la réal' derrière, il y avait les bonnes références, on s'est assez vite entendus et on a dit oui. Ça s'est décidé très vite.

(UR) Est-ce que ta maman aimerait que tu lui chantes bonne fête avec ton groupe ?

(AK) Je lui ai montré pour la fête des mères, elle était contente mais sans plus. Et elle a trouvé, par exemple, quand l'album est sorti, la pochette horrible ! mais horrible… « Pouah, avec quelle gueule ils vous ont fait, on dirait des gros pochards ! », voilà… Elle a pas joué à Street Fighter II, elle a pas regardé Terminator II donc forcément elle a rien compris !

(UR) Un autre projet auquel vous avez participé est le film « Océane », dans lequel vous apparaissez…

(AK) Oui, on s'est retrouvés à jouer là-dedans, c'est un couple de réalisateurs – lui bossant chez Canal+, Philippe Appietto , elle Nathalie Sauvegrain, qui est photographe à la base (elle fait des photos pour Rock & Folk, elle a tiré le portrait à Alice Cooper, Iggy Pop et d'autres stars dans le genre) – qu'on avait rencontrés une fois à une de ses expos photo. Et on s'était retrouvés assez vite à faire des photos pour cette fille-là, le courant était très bien passé donc on était restés en contact. Et un jour ils ont eu le déclic de faire un film et ils ont monté le projet – c'était un petit budget hein, cinéma indépendant, histoire de Rock'n'Roll et surf – ils ont été chercher les contacts qu'ils avaient directement, soit dans la musique, soit dans les acteurs qu'ils avaient pu rencontrer, donc ils ont fait appel à leurs connaissances directes… Ça a été presque familial, à l‘arrivée… Et on y joue notre propre rôle ! c'est-à-dire qu'on est les Sticky Boys qui arrivent au concert, et puis des scènes se déroulent sur la toile de fond de notre concert, un samedi soir si je raconte pas de conneries, voilà… une espèce de bar de Rock'n'Roll et Hippie au bord du spot de surf. Il y a eu pas mal de participations d'autres musiciens : François Maigret, que je connais à travers ma démo justement, ex-Shanka de No One qui a un groupe qui s'appelle The Dukes qui sont à la BO du film, il y a un certain nombre de Stupéflip… enfin c'est un truc un petit peu melting pot à droite à gauche… il y a Juliette Dragon, la reine du burlesque à Paris, qui joue dedans aussi… on a de la chance d'avoir Tito Larriva, qui est un mec qui a fait son groupe Tito & Tarantula qui a notamment joué pour des films de Tarantino, qui joue dans le film et qui joue le rôle de notre manager…

(UR) Donc, on en vient à cette démo avec votre bassiste dont le titre « Rock'n'roll nation » a fini sur l'album comme je disais… D'autres titres de l'album existaient déjà ou c'était le seul, alors ?

(AK) Ah non, c'était ce qu'on avait à l'époque.

(UR) … j'en conclus que c'est le plus vieux titre de l'album ?

(AK) Ouais c'est un des plus vieux en tout cas. Il y en a d'autres qui ont été rebougés, mais c'est celui qui a le moins bougé depuis.

(UR) Venons-en à la conception de l'album : Vous commencez à travailler avec Francis Caste, vous enregistrez aux studios Ste Marthe, puis vous passez chez Listenable Records ! Ça en fait, des choses qui se précipitent… Ça s'est déroulé plutôt facilement ?

(AK) Ouais, c'était cool ! On a commencé à enregistrer l'album en début d'année 2010, donc ça commence à dater… chez Francis Caste parce que c'est un peu le nom qui nous a été soufflé à droite à gauche, « le célèbre ingénieur du son », pour cette zique-là… On va donc rencontrer ce fameux Francis Caste : et le mec est absolument génial en fait, il s'investit dans tous les projets à donf', le caméléon, qui a des oreilles de malade, qui comprend tout de suite, les groupes, là où ils veulent aller, qui est de très bon conseil pour les sessions studio… Donc ça s'est super bien passé avec ce bonhomme-là ! On va certainement enregistrer le prochain chez lui encore d'ailleurs, voilà on a des choses à faire encore avec ce mec. Donc on a enregistré, derrière on a continué à tourner parce que l'idée pour nous c'était vraiment de trouver un label qui était capable de nous aider sur la diffusion, la promotion, la distribution de l'album, on n'avait pas envie de se coltiner ça tout seuls ; et puis on avait envie de bénéficier d'un réseau qui existait déjà en fait, un truc qui était déjà implanté. Donc on a tourné, on a envoyé des mails, des lettres, des démos à droite à gauche, contacté du monde, et puis finalement le label le plus abouti et puis le plus intéressant pour nous c'était Listenable, vers qui on s'est tournés une première fois, on s'est tenus au courant de nos actus, et quand l'album a été fini d'être mixé, quand la pochette a été réalisée, là ils sont venus nous voir en concert, et ont trouvé le show vraiment bien, donc on a discuté à la suite de ce concert-là et très vite on s'est retrouvés à signer avec eux. Donc ça s'est fait assez naturellement, mais on avait dans la démarche de trouver un label comme ça, donc on a tourné, on a fait des dates, à un bon moment, histoire de se faire voir, d'aller à droite à gauche, rencontrer du monde, et histoire de… se donner la chance, en tout cas, de trouver un label. Comme ça on est contents ça a marché, voilà… Je sais pas si on aurait attendu deux ans de plus, j'en sais rien du tout… C'est vrai qu'on commençait à en avoir marre !

(UR) Venons-en enfin au contenu musical ! Bon, je ne crois pas m'avancer trop en vous supposant tous fans de AC/DC ? Je hasarderais même que vous préférez la période Bon Scott…

(AK) C'est vrai qu'il y a tous les albums avec Bon Scott qui ont été enchaînés c'est des monstrueux albums. Le « Back In Black » il est au moins aussi phénoménal que le « Highway To Hell », en tout cas au niveau des compos quoi. Voilà, après ils ont leur petit « déclin » dans les années '80, puis ils sont revenus très très fort derrière… C'est vrai qu'aussi tu vois on a adoré « Stiff Upper Lip » quand il est sorti par exemple, mais c'est aussi de la zique qui est jouée par des mecs qui ont de la bouteille, qui ont 30 ans ou 40 ans de guitare derrière et ça s'entend vachement, les morceaux sont énormément arrangés, sont vachement plus fins et subtils… Nous, au jour d'aujourd'hui, on a encore la patate et l'envie pour envoyer la purée avec 3 accords, et c'est vrai que c'est peut-être ce que tu retrouves plus sur les vieux albums d'AC/DC qui étaient certainement dans cette démarche-là aussi, à l'époque…

(UR) C'est peut-être le son qui me fait plus penser à Bon Scott… carrément à Dirty Deeds parfois.

(AK) Ouais ? En même temps c'est une Gibson branchée sur un Marshall, y'a pas de mystère non plus ! Mais ouais c'est clairement du son qui nous intéresse, et puis qui nous parle énormément.

(UR) … Ajouterons-nous une pointe de Rose Tattoo pour les moments les plus Punk ?

(AK) On s'est nourris, évidement, de toute cette clique-là, Rose Tattoo, AC/DC, Motörhead… mais ouais on a toujours écouté beaucoup de Punk aussi, à côté. Là, ça se ressent peut-être moins, mais on adore aussi des groupes de Thrash américain et des Testament, des Nuclear Assault ou des Municipal Waste, on adore cette came-là aussi. Et puis, on aime bien les groupes qui ont amené à tout ça, les bons groupes de Blues, les Creedence & co qui nous parlent énormément, et qu'on se met quand on est sur la route… puisque le Hard Rock, de temps en temps, c'est un petit peu fatiguant quoi… Mais bon après c'est le côté fun qu'on a peut-être plus dans le Thrash, si tu veux… Mais tu vas voir tous ces groupes de Thrash qui font une musique pourtant super brute, Testament, ou Nuclear Assault, ou d'autres encore : les mecs tu les vois jouer, ils ont la banane en fait ! ils sourient, il y a du fun, et voilà… Ça s'entend pas dans notre musique, au niveau du son, mais c'est une ambiance, un état d'esprit qu'on aime bien en tout cas si tu veux, ce côté fun, fendard et fêtard, quoi. Bref…

(UR) Dans le genre influence inattendue, on peut aussi parler de cette reprise de « I fought the law » que vous proposez sur scène…

(AK) En fait on s'est dit que ça serait peut-être bien de glisser une ou deux reprises dans notre set. Faire un truc évident comme du AC/DC ou du Motörhead, déjà ce serait forcément moins bien fait que l'original, c'est-à-dire : qu'est-ce qu'on va pouvoir apporter de plus ? Sachant qu'on joue dans la même direction, mais des mecs qui maîtrisent leur chanson depuis 30 ans… et puis c'est l'original, on n'aurait rien apporté de plus que ça… On s'est dit autant prendre des standards du Rock, donc on en a essayé plusieurs, et puis voilà « I fought the law » qui a été repris par des tonnes de groupes y compris par les Clash [leur version suit sensiblement celle des Clash], qui a été connue notamment par eux d'ailleurs, qui a été revisitée, revue et remise en avant par ces gars-là, ça nous a parlé, on a bossé. Il se trouve que c'est des accords qui nous correspondent aussi, la tessiture aussi, il y avait des harmonies qui nous plaisent à faire… Ça reste un gros standard Rock quand même, on n'a pas hésité trop longtemps et on est partis sur ce truc-là.

(UR) Le bar diffusait la vidéo de « Miss Saturday night » quand on a commencé à causer… Pourquoi avoir choisi ce titre-là pour un clip?

(AK) En fait on n'a pas trop eu le choix, dans la mesure où c'est un peu un cadeau. Le réalisateur qui nous a fait le clip, Didier Kerbrat, est une grosse pointure qui a fait des trucs pour BB Brunes, Yannick Noah, mais qui est un gros fan de Hard à la base, et qui, un jour, nous a vus en concert et nous a dit « les gars, j'ai envie de vous cliper – par contre je choisis le titre ». C'est un titre qu'on assume complètement, qu'on aime autant que les autres, mais il s‘est trouvé que lui, il avait adoré l'énergie et les harmonies sur ce titre-là sur scène, et il avait envie de retranscrire ça derrière sa caméra. On est très contents du résultat puisque, pour nous, c'est vraiment fidèle à l'image de ce qu'on est, et – en tout cas sur scène – qu'on essaie d'être, si tu veux. Donc en ça on est très satisfaits d'avoir pu faire ce truc-là.

(UR) Supposons que le choix du titre vous était revenu ?

(AK) Nous, on avait pas mal communiqué sur « Bang that head » au début… On essayait peut-être de mettre ce titre-là en avant, qui fait 3 minutes, qui est assez efficace… C'est peut-être celui-là qu'on aurait mis en avant. C'est vrai que les gens, curieusement quand même, reviennent souvent sur « Miss saturday night » : le refrain est assez simple à chanter, les gens le reprennent facilement, donc c'est pas forcément mauvais je crois non plus… Je sais pas, j'avoue que du coup on ne s'est pas vraiment posé la question.

(UR) Vous avez également choisi « Bang that head » pour « Océane », n'est-ce pas ?

(AK) Ouais, exactement. On l'interprète aussi, ouais.

(UR) Je trouve peut-être « Bang that head » plus… emblématique ?

(AK) Là encore, c'est eux qui ont choisi. Mais oui, peut-être que ça peut être curieux, c'est pas le plus représentatif « Miss Saturday night »… J'en sais rien à vrai dire. Bon, pour nous il fait partie de l'album, donc il est là, il existe et… je pense que même si plus tard on a des titres à écumer, au fur et à mesure de l'album, ou autre en tournée, il devrait rester assez présent. Nous on a beaucoup de plaisir à le jouer en tout cas.

(UR) Je disais que je trouvais que les évènements s'étaient enchaînés vite pour vous, toi tu surenchérissais en déclarant vous revoir travailler avec le même producteur… Est-ce que vous avez déjà des projets en ce sens ?

(AK) Ouais, il y a déjà des projets… Notamment , comme je te disais, parce qu'on a enregistré l'album en 2010, on l'a fignolé en 2011, il est sorti en 2012… donc ça fait trois ans qu'on se trimbale les mêmes morceaux, c'est pour ça qu'on agrémente d'un petit peu de reprises, pour aérer un petit peu tout ça. Mais on tourne avec les mêmes trucs depuis un moment et on s'est interdit de proposer de nouveaux titres pour pas rogner ceux qu'on avait déjà faits : évidement, quand tu écris des nouveaux titres, tu les trouves tout de suite plus beaux et meilleurs que ceux que tu as faits avant, donc on s'est un petit peu interdit tout ça. Et, du coup, là on commence à entamer un travail de composition, et c'est assez prolifique. Il y a pas mal de choses qui sortent, on a pas mal d'idées, pas mal de trucs qui partent dans tous les sens… Si tout va bien on devrait enregistrer en février prochain, pour une sortie… pour le printemps ? On espère en tout cas, printemps 2014.

(UR) Je dois comprendre que vous avez quasiment de quoi remplir un album, déjà ?

(AK) On n'a pas encore toutes les compos, mais de toute façon, on va en faire plus que ce qu'il faut et sélectionner, une fois qu'on aura les oreilles fraîches et reposées, se laisser peut-être un petit mois, et aller tracker celles qu'on préfère.

(UR) J'aimerais conclure par deux questions générales auxquelles nous aimons comparer les réponses fournies : la première serait de te demander ce que tu as pu découvrir récemment, musicalement ?

(AK) Des sorties d'album ? Alors la première chose – qui est horrible hein –juste à dire c'est qu'on a tellement la tête dans le guidon que, finalement, t'as pas énormément de temps pour aller écouter…

(UR) C'est également un retour qu'on a souvent !

(AK) Mais ça m'étonne pas hein … D'ailleurs c'est marrant parce que moi, quand je lisais des interviews, et que je voyais les mecs qui disaient ça, je me disais « putain les gars vous pouvez pas écouter ? »... et en fait non ! Tu es tellement à fond sur tes chansons… que t'as pas forcément le temps – tu es tellement toi-même en train de bosser ton son, d'écouter ton son, tu vas piocher dans les trucs que tu connais, que tu écoutes et qui te servent plus ou moins de références et d'idées… Mais c'est un peu difficile maintenant. J'ai acheté le dernier Airbourne il y a peu de temps… Le bassiste connaissait depuis un moment Social Distortion, je n'avais qu'un album, il en a acheté deux-trois récemment et je m'écoute ça beaucoup en ce moment…. Quoi encore ? J'ai découvert récemment Billy Bragg, il y avait un ou deux titres que je connaissais, c'est un mec de Folk un peu révolutionnaire sur les bords, qui a fait ses trucs dans les années 80… très très bon, un mec engagé mais… mais très chouette. Voilà, des petits trucs comme ça.

(UR) Plus inattendu aussi ! Seconde question : le téléchargement illégal ?

(AK) Ça c'est un… grand débat ! Parce que nous, on en est à la période où on n'en a rien à foutre, mais vraiment… Parce que les ventes de disques se cassent la gueule, on touche très très peu sur ce qu'on peut vendre – c'est assez dérisoire d'ailleurs. Du coup, le côté positif pour nous c'est que plus les gens te téléchargent, plus ils font écouter les morceaux : si ça leur plaît ils vont faire écouter à leurs potes, et pour nous c'est finalement un très bon moyen de promotion. Maintenant, à côté de ça, il y a une réalité qui est que les mecs qui font ça à plein temps, il faut bien qu'ils vivent de leur art, on pense à notre label qui se crève le cul pour faire vivre les groupes qui sont chez eux, et puis qui, eux, essaient de vivre de ça. C'est des boulots à plein temps, et ça, évidemment, ça tue le métier… Il y a donc du bon et du pas bon dans le téléchargement. Maintenant est-ce qu'un jour ces histoires-là seront réglées ? je n'en sais rien du tout. Et c'est comme tous ces streamings sur youtube : évidement c'est bien, et évidement c'est pas bien… J'ai pas une idée arrêtée là-dessus, si tu veux… Peut-être que plus tard des lois vont être un petit peu plus précises, avec une histoire de rétribution pour l'artiste selon le nombre de vues qui ont été effectuées ou quoi, c'est parfois le cas mais c'est encore très très flou, notamment en France… On verra, pour le moment, nous, en tout cas ça ne nous gêne pas plus que ça. Evitez, hein, les gars ! On préfère si vous achetez l'album, évidement ! Mais on peut pas en vouloir à un mec qui grave le skeud parce qu'il a pas les moyens de se l'acheter, et puis qui va écouter le truc et le faire écouter à son pote… Les mecs, peut-être, en contrepartie, viendront en concert et s'ils trouvent ça cool, ils achèteront le CD ou le t-shirt à ce moment-là, enfin il faut voir les choses comme ça… mais téléchargez pas, c'est pas bien !

(UR) En tout cas pour l'instant c'est un phénomène insensible pour vous ?

(AK) Voilà on n'en sent pas les effets, pas plus que ça… Ce qui est difficile par contre, c'est que ça rend très difficile de quantifier le nombre de personnes qui connaissent réellement ta musique. C'est-à-dire qu'on connait à peu près le nombre de ventes sur tes albums, tu sais à peu près combien de fois tel titre a été téléchargé par des itunes ou des trucs comme ça, mais du coup c'est très difficile à quantifier… aucune idée, quoi. Il y a des endroits où on arrive, on pense faire 50 personnes et puis t'en fais 200 ou 250 : on dit « woah comment ça se fait ? »… c'est peut-être grâce au téléchargement. C'est peut-être grâce à la promo qui a été bien sur place, tu sais pas. Et puis en contrepartie il y a des fois où tu t'attends à une super date, tu arrives et t'as 25 pélos… ça nous est arrivé il y a peut-être 6 mois ou 1 an, encore... c'est de plus en plus rare, et tant mieux, mais voilà. Je sais pas, vraiment c'est un sujet très flou… Vraiment difficile de se projeter, je ne peux pas dire que je sois anti-téléchargement : qui ose dire qu'il n'a jamais téléchargé un titre de sa vie ? c'est pas vrai, quoi ! Moi-même je l'ai fait des dizaines de fois. Mais, de mon côté, je me dis que j'ai eu un réflexe si tu veux : j'ai téléchargé un truc, si le machin me plaît je vais aller acheter le CD, je vais le commander, je vais aller voir le groupe en concert, je vais voir ce qu'ils proposent à coté en produits dérivés… Il y en a qui doivent s'y retrouver quelque part aussi, donc je sais pas. Mais moi de mon côté, de notre côté à nous en tout cas on ne ressent pas grand-chose à ce niveau-là. Mais je comprends les mecs qui vivent exclusivement de ça et qui essaient aussi de tirer parti, et peut-être de faire un petit peu leur beurre, parce qu' à un moment donné ça peut peut-être devenir intéressant… Tu te souviens du scandale avec Metallica et Napster à un moment donné ? c'est pas totalement faux. Après les mecs sont peut-être assez riches comme ça… Tu sais, c'est comme les dates : tu fais des dates, des dates qui ne sont pas déclarées, ça tue le métier aussi, puisque les mecs vont accepter des biftons sous la table, alors que si tu as un cachet qui est déclaré ça permet de vivre un petit peu mieux, quoi. C'est le même genre d'histoires, maintenant c'est un milieu qui est un petit peu particulier, enfin tout ça… Nous de toute façon on est dans l'optique, encore, où l'on ne vit pas de notre art, on ne vit pas de notre musique, donc on a un peu un décalage, on n'est pas forcément les mieux placés pour répondre à tout ça.

(UR) J'ai eu la chance de pouvoir poser cette question à Steve Rothery de Marilion, qui financent comme tu le sais peut-être leurs albums grâce à leurs fans depuis des années… Cette solution te semble-t-elle applicable à n'importe quel groupe ?

(AK) C'est très cool ! Il y a un groupe avec qui on s'est déjà retrouvés sur scène, qui s'appelle Toybloïd donc qui n'ont rien à voir hein, c'est un espèce d'Indie Rock un peu Punk avec une nana au chant. Ils ont enregistré un EP il n'y a pas très longtemps, et il me semble qu'ils ont fait ce système-là pour financer leur truc : ils ont étés en studio à Londres, et ils ont demandé des dons aux fans en fait, et selon les tranches de blé qu'ils donnaient en retour ils leur filaient un t-shirt… c'est-à-dire si tu donnais 50€ tu avais le t-shirt et une dédicace, une soirée avec le groupe, et puis une démo… et ainsi de suite si tu veux. Finalement c'est un concept qui marche aujourd'hui, et c'est pas complètement débile hein.

(UR) Ça a fonctionné, pour eux ?

(AK) Pour eux ça a marché ouais, ils ont réussi à faire leur EP comme ça, et je crois que les gens sont plutôt content, 1 de les avoir soutenus, et puis 2 du coup d'avoir une reconnaissance derrière et un retour, parce qu'ils ont pris les coordonnées de tous leurs financeurs. Mais c'est vivre avec son temps aussi, parce que tout ça c'est en train de changer, c'est encore super-instable… on verra ce que ça va donner d'ici quelques années, les choses vont se mettre en place, ça va pas être évident, mais ça tâtonne encore pas mal.

(UR) Donc tu n'es pas dubitatif, comme on me rétorque parfois, sur l'adaptabilité de ce système à des groupes ne disposant pas de la réputation de Marilion ?

(AK) Je ne pense pas non, si tu te démerdes bien ça marche. Ça se fait beaucoup, tu vois les groupes qui se sont fait financer leur truc par – comment ça s'appelle le machin, là ? de financement assez connu là, avec lequel se sont développés certains artistes sur internet… tu vois, là ? My Major Company… un truc comme ça. Et ça marche ! Et ça, ça a marché même en France, donc non : il faut évoluer, faire évoluer les mentalités en fait, faire évoluer un petit peu tout ça et voir ce que ça va donner. Moi je t'avoue que je n'ai pas plus d'avis que ça pour le moment, on n'est pas au niveau où on a l'expérience et le recul pour pouvoir dire concrètement, avec des comparaisons, voir ce qui se passe. Mais ça va se mettre en route petit à petit, c'est pas complètement débile.

Regard plutôt lucide pour un musicien à la réputation plus fêtarde qu'autre chose (réputation mise à mal par la grenadine qu'il se commande à la sortie de l'interview…) mais contrebalançant parfaitement le fort capital sympathie du bonhomme, en adéquation parfaite avec sa musique. Et lorsque les deux se retrouvent sur scène, ça donne ces prestations explosives qu'on a pu apprécier lors de leur tournée des festivals d'été et qui me convainquent définitivement de miser mes billes sur eux dans le Hard français.

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