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S T E V E N   W I L S O N Le Trianon, Paris 08/03/2013

« Mais qui joue ce soir ? », nous demandaient passants et touristes aux abords du Trianon en apercevant cette queue impensable, s'attendant à se voir répondre un nom qu'ils connaitraient, mais sûrement pas Steven Wilson. Malheureusement, la renommée du bonhomme est autant à l'origine de cet afflux que l'incompétence de la salle, ouvrant bien après l'heure prévue… N'empêche que le Trianon se remplira bien vite, frôlant le complet. Si les balcons semblent un peu plus clairsemés, la fosse est pleine d'un public apparemment enthousiaste, à en juger par les échanges autour de nous, tournant autour des albums solo de Wilson, voire de Marilion que certains d'entre eux appréciaient dans cette même salle il y a peu à nos côtés… Marilion ? Oui oui, c'est bien le chemin que prend « The Raven That Refused To Sing », remontant à des choses bien plus anciennes encore que le faisaient ses deux prédécesseurs – tous deux d'excellente facture, nous ne nous déplaçons pas pour rien…

Steven a bien fait les choses : le soundcheck se fait discrètement, devant une animation spécialement prévue pour l'attente (d'une demi-heure) : les lights baissent à demi pour faire de la place à la pochette de l'album animée sur fond de trame sonore à la Vangelis. Magnifique façon d'aborder un show forcément ambiant et velouté. Il commence d'ailleurs par « Luminol » et « Drive home », l'intro de l'album quoi, qui sera d'ailleurs joué dans son intégralité, bien que pas d'une traite. Le Band de Steven est le même que sur album : Theo Travis à la Flûte traversière et Sax soprano, conférant au son une richesse inhabituelle sur scène, Nick Beggs à la basse, également important soutien vocal, et les trois nouvelles recrues : Marco Minneman, batteur suffisamment fin et délicat, Guthrie Govan, guitariste tout aussi subtil, ainsi qu'Adam Holzman, claviériste de haute volée. Bref, Steven sait s'entourer, et le son sera aussi riche que sur album, chose nécessaire pour apprécier l'écriture solo de Steven. Concernant l'album, il gagne pas mal sur scène : si la présence de l'équipe complète (ainsi que l'utilisation de certaines bandes, me suggèrent mes oreilles, pour les chœurs, ou alors l'ingé-son est très doué) rend toute la richesse des parties, une bonne dose de punch supplémentaire épice le tout. Les compos se révèlent également dans une simplicité plus lucide : « Luminol » semble être un pont extrait de « Dogs » de Pink Floyd par exemple. Gagnant en dureté, elle conserve l'éclat de ses chœurs, de même que « Drive home » celui de son thème de guitare acoustique, et en ressort plus cohérent que sur disque. « The pin drop » quant à lui verra ses parties plus rentre-dedans devenir suffisamment consistantes pour acquérir une plénitude parfaite.

Plus loin, « The holy drinker », déjà un des meilleurs titres de « The Raven That Refused To Sing », pousse la formule Piano-flûte-percussions au plus haut niveau qu'on pouvait espérer sur scène, Steven y prenant un temps la basse, d'ailleurs très en avant, comme le sont ses claviers lorsqu'il s'y met… seul vice du bonhomme. « The watchmaker », autre gros morceau de cet album, et plus ou moins au milieu de la soirée, est habité d'une belle poussée d'adrénaline, Theo Travis se transformant en Ian Anderson par son énergie et Steven en… barbare, malheureusement, sortant sa partie de picking au médiator (non mais). Le morceau sera joué derrière un voile enveloppant la scène et animé de projections vidéos, essentiellement des scènes d'horloges crispantes et autres montres stressantes, dans lesquelles je verrais volontiers un hommage à « Time » du Floyd (voire à « Pulsar » de Vangelis à cause de l'horloge parlante)… D'ailleurs la ligne « Each hour becomes another empty space to fill » me frappe par l'hommage qu'elle pourrait également être à The Wall… Dis donc, Steven ne serait-il pas en train de me mettre dans un état ultra-réceptif, comme Vangelis ou Pink Floyd savent le faire ? Je me surprends même à noter la récurrence du mot « tree » dans les lyrics : « Holy drinker », « Pin drop », « Track one », « Raider II »… et évidement Porcupine Tree.

« The Raven That Refused To Sing » conclura le show, avec évidement sa vidéo animée en fond, puisque tout le concert sera joué avec un fond vidéo. Ce dernier morceau, lui aussi, acquiert sur scène une puissance qu'il n'a pas sur album, où il sonne encore un peu lâche… Le reste des deux heures et quart est évidement consacré à « Insurgentes » et « Grace For Drowing », ce dernier livrant, d'abord, un « Postcard » extrêmement mélodieux, soutenu par un splendide Holzman, marquant d'ailleurs d'autant plus le contraste avec le nouvel album, résolument Progressif et presque 70s. « Deform to form a star » me procurera exactement la même impression, puis « Index » viendra ensuite pointer le côté plus brut décidément laissé de côté pour ce nouvel album. Wilson y endosse un quasi-jeu d'acteur dramatique, et le public est spécialement réceptif. Il le sera aussi pour « Raider II », à le croire composé de serial killers en puissance, Steven s'amusant d'ailleurs à introduire ce morceau en constatant la regrettable infériorité française en la matière, bien pâle devant les grands noms émaillant l'histoire criminelle anglaise… On passe enfin à « Insurgentes » avec d'abord le morceau-titre, à l'atmosphère posée respectée, puis « Harmony korine », autre favori du public à en juger par sa soudaine agitation.

Ce public, j'en touche quand même un mot car il me déroute : étonnamment statique, il semble perdu dans la discographie solo de Steven et ne réagit qu'aux (rares) passages Metal-like. Certains headbanguent sur ses morceaux, qui s'y prêtent pourtant mal, et se font clairement chier sur d'autres… J'interprète ça comme un public venu en partie pour Porcupine Tree presque par erreur. Heureusement pour eux, Steven concède un « Radioactive toy » en rappel, à l'exécution splendide, malgré la guitare désormais désaccordée de Steven dont il ne semble pas se soucier malgré son caractère qu'on devine obsessionnel. Les lights se font incendiaires, Govan tout autant, et l'effet est terrible… Steven justifiera ce choix en présentant les trois premiers Porcupine Tree comme des disques qu'il considère quasi-solos… Peu importe la raison, le final est fort. Seul regret (et incompréhension), le timing permettait bien une première partie, pourquoi s'en être privé ? Peu importe aussi, la formule solo de Steven, affinée d'album en album, s'enfonçant dans un Prog ambiant aux relents 70s de plus en plus poussés, trouve sur scène une parfaite contrepartie à son pendant studio plus léger. Steven est en train d'inventer la musique studio de scène…

The Outcast



 



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