Pour ceux qui ne vous connaissent pas encore, vous pouvez expliquer brièvement les Tambours Du Bronx ?
Dom : Brièvement, ça ne va pas être facile ! Les Tambours Du Bronx, c'est une bande de potes à la base, qui ont monté un groupe il y a 31 ans. Ils voulaient faire de la musique mais ils ne savaient pas comment. Ils avaient accès aux bidons de la SNCF parce qu'ils habitaient une cité cheminote. Ils n'avaient pas forcément les moyens d'acheter des instruments de musique à l'époque, et ils ne savaient pas spécialement en jouer non plus. Au début, c'était un évènement unique, une blague, et ça a cartonné tout de suite. Donc l'évènement s'est reproduit, s'est professionnalisé au fil des ans, jusqu'aux 31 ans, où on a fait notre petite crise de la trentaine. On s'est dit, on va se lâcher et faire un groupe de rock. Je tiens à préciser qu'on a toujours été un groupe de rock, mais dans notre tête. C'était évident dans l'attitude, c'était évident pour nous, mais pas forcément pour le public ou les programmateurs. Heureusement d'ailleurs, c'est ce qui fait qu'on est tout public, tous âges, tous styles confondus. Ce n'est pas péjoratif ! A nos 31 ans, on a décidé d'essayer et d'exploiter totalement cette voix rock, de changer, de se faire plaisir.
Ce soir à la Rock School Barbey de Bordeaux, c'est votre dernier concert de l'année. Comment c'est passé cette année 2018 ?
Franky : Très bien ! Moi je suis arrivé il y a deux ans à peu près, de façon secrète pendant une petite année. On a commencé à faire nos premiers vrais concerts début 2018, et sincèrement c'est que du positif. On n'avait encore rien sorti, et des organisateurs étaient déjà intéressés, des salles étaient remplies tout de suite. J'étais assez surpris dans le bon sens du terme, d'un accueil aussi chaleureux, et le bouche à oreille a bien fonctionné, et sur internet aussi. Ensuite, nous avons sorti rapidement un clip avec le titre "Jour De Colère" et les concerts se sont enchaînés. Juste avec un clip, on a rempli pas mal de salles. En 2018, on a fait une première jolie tournée Française, on a sorti notre premier album "Weapons Of Mass Percussion" le mois dernier. Depuis on croule un peu sous les demandes de concerts sur 2019/2020. Donc sincèrement, c'est un démarrage en fanfare. On est très contents de ça ! Là on sent que la promo et la communication fonctionnent de plus en plus. Sur le dernier trimestre, pratiquement toutes les salles étaient sold out.
Donc on remercie le public de venir en masse. On remercie les organisateurs d'avoir aussi bien travaillé le projet. Donc on espère que ça va continuer comme ça pour les années à venir ! On donne rendez-vous aussi à tous les festivals d'été qui sont en train de se booker. Je pense que le spectacle des Tambours Du Bronx version metal se prête beaucoup au plein air. On vous donne donc rendez-vous cet été pour encore plus de sensations fortes.
En parlant de festival, que pensez-vous de la journée 100% française sur une des scènes du Hellfest, le jour de l'ouverture de l'édition 2019 ?
Dom : [RIRES] La question piège du jour ! Ben on a tous bien noté... Après on ne sait pas pourquoi, on aimerait bien savoir.
Franky : On est très heureux de voir une belle journée 100% française sur une Mainstage Hellfest. C'est un festival qu'on adore tous. Je pense qu'il y aura beaucoup de personnes du groupe qui seront présentes ce jour-là, pour voir des potes, pour féliciter les groupes, les collègues. Il y aura Renato qui jouera avec Trepallium, Reuno avec Lofofora, Steph Buriez avec le Bal Des Enragés. Donc tous nos chanteurs seront là sur les trois jours. C'est un festival qu'on soutient énormément. C'est vrai, ça nous aurait fait super plaisir de partager cette belle journée française, mais je pense que le projet de la version metal est encore un peu neuf. On verra les prochaines années.
Plus de 30 ans de carrière, c'est quand-même pas rien. Comment arrive-t-on à garder un groupe soudé, sans que ça ne parte pas dans tous les sens ? Pas trop de turn over ?
Dom : Si un peu de turn over ! Il a fallu installer des portiques de sécurité, des détecteurs d'armes blanches, des... [RIRES] Non, c'est vrai on s'en sort bien. Je pense que c'est déjà le fait qu'on cherche avant tout l'humain, c'est ce qui compte quand on prend quelqu'un chez nous. Il faut déjà que ça colle entre nous. A chaque fois qu'on a fait de la musique avec quelqu'un, ça a collé humainement. C'est comme ça qu'on arrive à durer dans le temps. C'est le secret ! Déjà dans un groupe de trois, quatre personnes, c'est pas forcément évident. Il y a eu un turn over mais pas si énorme que ça au vu du nombre de musiciens dans le groupe, et le nombre d'années. Là on peut dire qu'il y a eu une centaine de personnes qui sont passées... il faut savoir qu'on est quinze musiciens.
Franky : J'aimerais rajouter un petit quelque chose à ce sujet. J'avais toujours l'expérience de groupes à quatre, cinq ou six personnes, et du coup je trouve que c'est peut-être plus facile dans une troupe, avec les techniciens presqu'une vingtaine sur la route, de vivre en communauté, parce que si on s'est pris la tête avec un des membres, ils y a les dix-huit autres qui jouent un peu le rôle de médiateurs. Même si l'ambiance est super sympa, forcément on va avoir plus d'affinité avec tel ou tel membre. Ça fait presque une colonie de vacances qui se balade sur les routes. On partage avec plein de personnes, des moments différents : on va parler musique, sport, bringue, bière... c'est très varié ! Un groupe de quatre sur la route, quand il y a une tension, c'est beaucoup plus compliqué. Tout le monde ajoute sa bouffée d'oxygène, ça me fait plus penser à une troupe, plus qu'à un groupe en petit comité. Ça me plaît beaucoup !
Petite touche féminine de l'interview. Est-ce qu'il y aura un jour, une femme dans les Tambours Du Bronx ?
Dom : Il faut savoir que pendant trente ans, on nous a déjà posé la question plusieurs fois. Mais jusqu'à présent, pas une seule femme n'a postulé réellement. Ensuite pour le dernier casting qu'on a fait, car on avait épuisé tout le stock de musiciens qu'on avait [RIRES], on a passé une annonce sur les réseaux sociaux, pour mettre un peu les gens en concurrence, pour tester les musiciens, et là nous avons eu trois femmes. Sur les candidatures, seulement deux femmes se sont présentées, et une qui était vraiment pas mal mais qui était finalement en dessous... nous avons gardé seulement une personne sur tout le lot. Nous avons eu des tas et des tas de demandes. Tout ça pour dire qu'on nous pose souvent la question, mais que, jusqu'à présent, personne n'a vraiment joué le jeu en fait.
Comment passe-t-on d'un simple groupe de percussion urbaine à W.O.M.P. ?
Dom : On vient tous du metal et du rock. Il y a plein de générations dans le groupe, de 25 à plus de 60 ans. Donc on écoute des styles différents mais on vient tous du rock. Y'en a c'est plus rock sixties, d'autre hard rock, jusqu'au hard core pour les plus jeunes, ou un peu hip hop. On est vraiment tous du milieu du rock, des guitaristes, des bassistes. On n'a jamais écouté de percussions, jouer dans des groupes de percu, on n'a jamais fait de batucada. C'est même quelque chose qui ne nous intéresse pas du tout. On n'a jamais appréhendé le groupe comme un groupe de percussions. C'était donc très facile de franchir les limites. Ce qui était le plus dur, c'était de ne pas les franchir, jusqu'à présent.
Quand vous avez démarré le projet, vous pensiez déjà à un album ?
Franky : Inconsciemment, oui ! Quand je suivais les Tambours Du Bronx, et quand j'ai vu ce qu'ils faisaient avec Sepultura, mon fantasme était de pouvoir jouer dans ce groupe sous cette configuration. Ce jeu tribal, ça me plaît beaucoup ! Déjà pour l'expérience, mais j'avais déjà en tête le projet de sortir une dizaine de chansons.
Comment ça se passe au niveau des compos ? Vous êtes tellement nombreux. Vous avez fonctionné différemment pour l'album W.O.M.P.?
Dom : Il faut savoir que, historiquement, les Tambours du Bronx n'ont jamais composé tous ensemble, ou rarement. C'est trop compliqué, on est trop nombreux. C'est une ou deux personnes qui maquettent chez elles et ensuite passent éventuellement à d'autres pour arranger un peu les morceaux. De toute façon le choix final, c'est le groupe entier qui choisit si le morceau plaît ou pas. Là sur Weapons, nous avons travaillé beaucoup plus vite que d'habitude, avec un nombre restreint de musiciens, on a pris des morceaux existants, on en a créé d'autres. On a fait des parties de ping-pong entre studios. On a mis les guitares de notre côté, et envoyé à Franky pour qu'il ajoute la batterie. Parfois quand on manquait un peu d'inspiration, on envoyait presque trois fois rien à Franky, pour qu'il nous inspire. Très rapidement, on a été satisfaits, et on a envoyé ça aux chanteurs et au claviériste qui ont rajouté leurs touches chacun de leur côté.
Et d'où vient l'idée du nom Weapons Of Mass Percussion ?
Dom : C'est Franky qui a eu l'idée.
Franky : J'avais cette idée qui me trottait dans la tête depuis longtemps. Je l'ai proposée à Dom, à Ben, et sur le coup, tout le monde a trouvé la formule très sympa. Et ça revenait souvent dans les discussions quand on parlait du projet. On a intégré ce slogan naturellement.
Dom : Exactement, ça nous correspond bien !
Franky : Même les initiales au final, les gens se les sont appropriées. Ça correspond bien au projet.
Vous sentez que vous avez passé un palier supplémentaire avec W.O.M.P. ? Beaucoup d'articles dans la presse, la télé... j'ai vu dernièrement Canal+ avec Antoine Decaunes.
Dom: Je sais qu'avec W.O.M.P., il y a un intérêt de la presse qu'on n'a pas eu depuis longtemps. Passer un palier supplémentaire, je ne saurais dire, parce qu'avant on a déjà fait des choses énormes, notamment à l'étranger. On a toujours été très connus, mais je pense qu'on a été victime de notre succès, et beaucoup de médias, et certaines personnes, sont passés à autre chose. W.O.M.P. a permis de susciter à nouveau l'intérêt des médias, et de toucher un public jeune qui ne nous connaissait pas forcément.
D'ailleurs en parlant du public, à quoi ressemble celui des Tambours du Bronx ? Malgré la diversité, avez-vous des personnes qui vous suivent depuis longtemps ?
Dom : C'est un public tout-public ! C'est certainement pour ça qu'on est toujours là, après toutes ces années. C'était un peu la crainte en se spécialisant dans un style plus metal, plus dur. C'est aussi pour ça qu'on ne l'avait jamais fait jusqu'à présent. On ne savait pas comment le public allait réagir. Et finalement il réagit bien, tout le monde s'y retrouve quand même.
Renato : C'est toujours le spectacle des Tambours du Bronx, même s'il y a pas mal d'éléments qui se sont greffés pour ce spectacle-là. Moi je ne suis pas là depuis très longtemps, mais je vois bien le public et j'ai halluciné... ça va de 12 ans à plus de 60 ans, les mega fans des Bronx qui sont là depuis toujours. Ils viennent voir le spectacle metal et s'en prennent plein la vue. Et ceux qui débarquent grâce à cette tournée, sont aux anges. Au début du concert, les gens ne connaissent pas forcément l'album W.O.M.P., mais à la fin, on a l'impression qu'ils l'ont écouté pendant trois mois avant de venir. [RIRES]
Vous avez sûrement des anecdotes croustillantes à nous raconter ?
Franky : Y'a plein de bons moments ! Le premier truc qui me vient à l'esprit, le final de Sepultura au Motocultor, le fait de jouer "Roots Bloody Roots" en dernier titre du festival. Déjà je remercie le Motorcultor pour avoir fait confiance aux Tambours du Bronx avant la sortie de l'album, et à Sepultura d'avoir fait le final avec nous. En tant que musicien, c'est un rêve de gosse qui se réalise. Le public a été fantastique ! C'est quelque chose qui m'a vraiment marqué, je pense que je m'en souviendrai toute ma vie. C'est mon premier super souvenir de l'année 2018 ! J'en ai d'autres... je pense aussi au wall of death à Montcul [RIRES] Ça peut faire rire ! C'est le Plein Air Festival à coté de Lyon, où on a joué à un horaire d'après-midi et le public a super bien répondu. Je m'en rappelle très bien car c'était la première intervention de Renato, et comme il est de la région lyonnaise, il a eu un accueil fantastique du public. Et pour ceux qui ne connaissent pas le milieu du metal, un wall of death c'est quand la fosse se sépare en deux, et les gens se foncent dedans. Quand tu es sur scène il y a une dose d'adrénaline assez sympa. C'est un second super souvenir, mais il y en a plein d'autres.
Dom : Moi je cherchais une anecdote plutôt croustillante, mais y'en a eu tellement cette année que je ne sais pas trop... [RIRES]
Renato : Moi c'est la première fois que je joue dans des salles aussi grandes... donc d'habitude je me demande plutôt si les gens vont venir à mon concert, et là on ne se pose même pas la question. Pour le moment le souvenir le plus mémorable, c'est au Silo de Marseille. Quand j'ai vu tous ces gens, de tous âges, répondre avec une ferveur incroyable, pour moi le meilleur souvenir que j'ai de 2018 avec les Bronx.
Quels sont vos projets pour 2019 ? J'ai vu qu'il y avait déjà pas mal de dates annoncées en France. Vous pensez passer les frontières ?
Dom : Oui, on aimerait bien passer les frontières ! On va continuer à tourner sur Weapons, et la tournée est toujours en train de se monter. Et puis en parallèle, on va continuer à travailler sur une version classique des Tambours, Corros 2:00. Une sorte de grosse mise à jours du spectacle classique des Tambours du Bronx, plus axé percussion, un peu électro avec Arco Trauma qui est avec nous aux claviers. On n'a pas l'intention d'arrêter ni l'un, ni l'autre. On a joué trois fois le spectacle Corros en plein milieu de cette année Weapons. Ça faisait un petit moment qu'on ne l'avait pas joué, et on a pris un plaisir immense à le refaire, à le redécouvrir différemment, à le faire évoluer à chaque fois. Donc c'est quelque chose qu'on n'a pas envie d'enterrer !
Franky : Les deux sont passionnants, à des niveaux différents. Plusieurs membres du groupe parlent déjà de nouveautés pour les deux spectacles, de nouvelles compos pour Weapons, et de nouvelles idées aussi pour le spectacle des Tambours du Bronx classique. On avance sur les deux tableaux. Sur le premier album, nous sommes partis de morceaux existants des Tambours où on a rajouté le coté metal. Là je pense que le second album partira de titres metal pour rajouter les tambours ensuite, pour apporter quelque chose de plus catchy. Donc l'inverse pourrait être intéressant !
Dom : On a déjà pas mal d'idées ! Ne pas refaire le même album en tous les cas. Et investir un peu plus Renato car pour l'instant il n'a fait qu'un petit featuring sur l'album, mais on aimerait bien qu'il soit plus présent.
Renato : Et ça c'est très chouette ! J'ai hâte de participer à un skeud des Tambours et j'ai déjà plein d'idées.
Merci beaucoup !
Mais de rien [RIRES]
Franky : Merci Aidan !
Dom : Non non, on dit de rien [RIRES] On avait plein d'autres chose à dire mais on ne va pas divulguer tout d'un coup [RIRES]
Luc : On en était où au fait ? [RIRES]
Le mot de la fin stp ?
Luc : Franky je t'aime ! [RIRES] Je ne peux pas faire mieux ! [RIRES]
Franky : Merci à tous les auditeurs, et auditrices d'UltraRock, et très heureux d'avoir passé cette superbe année avec les Tambours. Je les remercie chaleureusement pour leur super accueil. Et très content de terminer la tournée à Bordeaux, dernière date de l'année.
Dom : Très fort, Franky président ! [RIRES]
Renato : Trop fort, moi je dis : tout pareil. [RIRES]
Les sites : http://www.tamboursdubronx.com/fr/ +
https://www.facebook.com/tamboursdubronx/
Aidan N. LeFloch
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