H E L L O W E E N
Interview de Markus Großkopf réalisée par Aurélie P.Lawless via Skype, le 9 juin

 

Nous avons attendu pas loin de 40 ans avant de voir un album s'intituler sobrement « Helloween » : pourquoi l'avoir fait maintenant et pas plus tôt, s'il y a une raison derrière ce choix ? Je sais qu'un EP est sorti à l'orée de votre carrière mais ce n'est pas véritablement un album en tant que tel, n'est-ce pas ?

Au début, c'est vrai qu'on avait plutôt envisagé « Skyfall » comme titre pour l'album, avec des variantes comme « Helloween's Skyfall » et autres trucs du genre, mais, au final, on pensait juste au fait d'être à nouveau tous ensemble, comme on était au tout début et ça a fait l'effet d'un renouveau, d'une résurrection. C'est là qu'on s'est dit qu'appeler l'album avec le nom par lequel toute notre histoire a commencé, qui rassemble les anciens membres et les nouveaux, tu vois, il ne pouvait pas y avoir de meilleur nom pour l'album au final.

Étonnamment, il n'y a pas de réelle « ballade » à proprement parlé dans cet album. Est-ce que vous souhaitiez rompre avec une certaine tradition, si l'on peut dire ?

En fait, on en avait enregistré une, mais, à la toute fin, au moment du mixage et de la production, on avait d'autres idées qui n'avaient plus rien à voir avec la chanson d'origine. Chacun y allait de son avis sur ce qu'une bonne ballade devrait être et, finalement, personne n'était réellement satisfait. Donc on s'est dit que ça ne valait pas la peine de mettre quelque chose dont on n'est pas sûr à 100%. On l'a mise de côté, on y reviendra peut-être avec d'autres pistes de réflexions qui seront capables de mettre tout le monde d'accord. C'est pour ça qu'on a préféré faire l'album sans ballade, ça nous a fait mal au cœur mais bon, je pense que la prochaine fois, on trouvera un moyen d'en faire une quand-même.

Depuis la réunion du groupe, et au regard de ce que tu me racontais précédemment, dirais-tu qu'il est plus aisé de faire un album ensemble ou est-ce plus compliqué du fait que plus de gens soient impliqués dans le processus ?

C'est vrai que ce n'est pas forcément facile puisque les idées fusent de partout, que ce soit pour la batterie, la guitare, etc. mais c'est un vrai challenge que d'arriver à tout trier pour sélectionner les meilleurs concepts émanant de chacun. C'est un très, très long chemin mais, à la fin, chaque seconde passée là-dessus valait totalement l'investissement quand on entend le résultat. Mais c'est aussi super fun de travailler avec toutes ces nouvelles visions, c'est juste que, parfois, t'as l'impression que ta tête va exploser ! (rires)

Est-ce qu'il y a une chanson du nouvel album où tu t'es immédiatement dit « ok, celle-là, elle va être énorme, il faut absolument qu'on la joue en live car ça peut devenir un nouveau classique » ? Et pourquoi cette chanson était « Fear Of The Fallen » ? Non, je plaisante, je ne t'influence pas, mais c'est celle que j'aurais choisie personnellement ! (rires)

(rires) Pour moi, et peut-être pour les autres, c'est « Skyfall » ! On a su dès le départ que c'était quelque chose de très spécial, on trouvait que ça faisait la connexion avec le bon vieux temps et le présent et que comme notre histoire est toujours en train de s'écrire, que nous réserve l'avenir ? Tu vois ce que je veux dire ? On a ressenti qu'avec cette chanson, on touchait du doigt ce que Helloween est supposé être, on s'est totalement retrouvé dedans.

Sais-tu déjà si vous allez jouer en live la version longue ou la version courte de « Skyfall » du coup ?

Non, pas encore, elle sera très probablement dans la setlist mais je ne sais pas encore les détails, on doit encore discuter de tout ça !

Je n'ai pas pu m'empêcher de voir quelque chose absolument dingue sur la page Facebook et Instagram de votre illustrateur : est-ce que tu savais qu'il avait intégré l'œil de Nergal (chanteur de Behemoth, ndlr) dans la couverture de la pochette d'album ? (Il a réalisé ce montage à partir d'une vraie photo de Nergal prise lors d'une visite dans un musée, nldr). Est-ce que tu étais au courant de la supercherie ou tu as été surpris comme nous, le commun des mortels, en l'apprenant une fois que c'était fait ?

J'ai effectivement vu ça aussi et je n'ai aucune idée de comment ça a été réalisé mais c'est hyper bien fait ! J'ai été totalement mis devant le fait accompli, la pochette de manière générale est dingue, il y a tous les éléments « clés » - c'est le cas de le dire – qui font le lien entre l'ancien Helloween et le nouvel Helloween, ça fait le pont entre le passé, le présent et le futur.

As-tu été surpris justement de l'engouement massif des fans vis-à-vis de la pochette d'album ?

On sait jamais trop à l'avance comment les choses vont tourner quand on donne des directives artistiques pour créer une pochette, mais quand on l'a vue nous-mêmes, on a trouvé que c'était une tuerie et on était à fond dedans ! On a pensé que si nous l'aimions autant, alors il y avait des chances que ce soit le cas aussi pour d'autres personnes.

Est-il prévu du merch’ exclusif avec des éditions limitées ou des trucs un peu fous ? (rires)

Je ne sais pas, il suffit que quelqu'un propose une idée, il pourrait très bien y avoir des sous-vêtements ou du papier toilette, pourquoi pas ! (rires) Tout peut arriver ! (rires)

J'ai l'impression que c'est plutôt nouveau, le fait de mettre l'accent autant sur le merchandising, dernièrement. S'agit-il d'un moyen plus efficace désormais pour générer des recettes plutôt que la vente de CDs, par exemple ?

Je pense qu'on peut dire que, maintenant, plus aucun groupe ne vend autant de CDs qu'avant, surtout comparé aux 80s. On vend toujours beaucoup d'albums, mais le business principal a changé. Ce qui marche, ce sont les live et le merchandising. Maintenant, on est libre, pour tourner, d'avoir notre propre merch’, avant on avait des compagnies pour ça qui nous coûtaient un œil, tout comme notre management. Désormais, on n’a besoin que d'une poignée de gens qui s'occupent de parfaitement tout. On peut faire ce qu'on veut, on book nos propres tournées, on vend nous-mêmes notre merchandising, c'est ce qui est rentable, actuellement, et nous fait vivre. On vend malgré tout pas mal d'albums car les fans de rock aiment toujours avoir les CDs, savoir qui produit, qui joue du clavier, ce qui est cool. Mais notre business se fait en tournée avec le merchandising, clairement. On a eu de la chance, malgré la Covid-19, puisqu'on a toujours été comme ça, toujours à tourner sans arrêt et, si on ne tourne pas, c'est pour enregistrer un album. On s'estime très chanceux, vu les temps qu'on vit actuellement, car on va repartir en tournée, on est dans une bonne situation, alors que j'ai des amis, qui sont dans le métier depuis 40 ans, qui sont obligés de jouer dans des fêtes d'anniversaire ou de petits clubs pour essayer de gagner leur croûte et, quand ils sont libres dans la semaine, ils travaillent derrière un bar, et je me sens tellement désolé pour eux. J'espère que ce sera bientôt derrière eux et qu'on pourra retrouver une situation normale prochainement. Avec un peu de chance, on peut espérer un futur proche plus radieux car les vacances vont arriver, il n'y a plus qu'à croiser les doigts pour que la situation n'empire pas davantage !

Penses-tu qu'on puisse dire qu'Helloween n'a jamais été autant populaire que depuis la réunion du groupe ?

On a connu la réussite déjà par le passé, surtout avec Andi (Deris, chanteur d'Helloween, ndlr), on a pas mal d'albums à notre actif qui ont rencontré un franc succès auparavant, mais c'est vrai que là, on est sur quelque chose de totalement différent, ça n'a vraiment rien à voir. Avoir autant de chanteurs maintenant, autant de songwriters, ça donne tellement d'autres styles et perspectives au groupe qu'est Helloween. Avec trois chanteurs, ça rend l'ensemble très intéressant, et honnêtement...j'adore ça !

Avez-vous été tenté, avec Helloween, de sortir un album sous l'étiquette « Keeper » et, si oui, qu'est-ce qui vous a persuadé de ne pas le faire ?

J'avoue qu'on y a pensé, surtout qu'on aurait eu le temps de le faire, mais cette idée de « Keeper » n'était pas vraiment la mienne, c'est plutôt celle de Kai (Hansen), donc on a voulu faire un truc qui y soit un peu connecté quand même en faisant du mieux qu'on puisse. Mais ça a fonctionné car tout le monde y a travaillé et ça sonne super bien au final.

Est-ce que vous aviez un plan B, à l'époque, à la place d’Andi Deris pour remplacer Michael Kiske ?

Non, pas du tout, c'était Andi du début à la fin, on n’avait aucune hésitation. On le connaissait depuis longtemps, on traînait ensemble, on a fait quelques enregistrements et on a su que c'était lui... Je suis content qu'il ait dit oui ! (rires)

Te rappelles-tu du nombre d'exemplaires vendus de l'album « Chameleon », connu pour être le moins apprécié du groupe ?

Je n'ai pas les chiffres précis en tête mais, ce qui est sûr, c'est que c'était beaucoup moins qu'un des « Keeper » ! (rires) Ce que je peux dire, c'est que cet album correspond à un moment où on était dans un très étrange état d'esprit, un lineup très étrange car pas stable, et personne ne s'entendait. On n'arrivait pas à accorder nos violons sur ce que Helloween était supposé être et on a fini par faire cet album qui ne nous représentait pas trop, ou bien pas assez, au bout du compte. Bon, maintenant, avec le recul, ce n'est pas si horrible que ça d'avoir un album comme celui-ci dans l'immensité de notre catalogue, ça reste néanmoins de la musique cool, juste pas à envisager sous le nom de Helloween. Mais je trouve que c'est pas plus mal d'avoir proposé ça au milieu de tous nos albums.

Continuons sur notre lancée en faisant appel à ta mémoire. Il y a une chanson intitulée « Desire To Rock » qui n'a été jouée que deux fois par Helloween en 1985. Est-ce que tu te souviens de cette chanson et du pourquoi ne pas l'avoir enregistrée ?

Je ne sais plus mais sûrement parce qu'on avait de bien meilleures chansons ! (rires) On enregistrait un peu à l'arrache, à l'époque, mais peut-être que c'est enregistré quelque part, je ne sais où ! (rires)

Le groupe a-t-il de nouvelles ambitions concernant la setlist ? Est-il possible d'envisager de vous voir et entendre jouer d'autres chansons provenant des albums « Keeper » ? Par exemple « Save Us », « Twilight Of The Gods » ou encore « We Got The Right » ?

Oui, on a évoqué toutes ces chansons, justement, et on a commencé à discuter des priorités à donner à la setlist et notamment ces titres qu'on n'a pas tellement joués ces dernières années. Donc, oui, on en a déjà parlé mais il faut encore qu'on en reparle (rires) notamment avant qu'on commence à répéter ! Mais je peux confirmer qu'on va effectivement mettre sur la table le fait d'insuffler de la nouveauté. C'est juste tellement difficile de faire des choix, on doit choisir parmi tellement ! Il y a toujours les chansons qu'il faut jouer impérativement, et il y a aussi ces autres chansons qui n'ont pas été jouées depuis un bail et qu'on veut jouer mais on ne sait pas comment faire parce qu'on en a trop. On essaye d'en caser un maximum, même faut vraiment qu'on prenne le temps de s'asseoir et d’en discuter ! (rires)

Vous devriez écrire les noms des chansons sur un mur ou un tableau et rayer les noms au fur et à mesure ! (rires)

Crois-le ou non, mais c'est exactement ce qu'on fait ! (rires) On écrit les noms sur un tableau et on change de tableau tous les jours jusqu'à ce qu'on trouve un moyen de contenter tout le monde, ce qui, évidemment, n'est jamais vraiment possible, même entre les membres du groupe, mais, une fois que t'as chopé la bonne ligne directrice...tu espères que ça va le faire !

En parlant de ça, est-ce que c'est compliqué de booker des tournées quand autant de talents prennent part à l'aventure ?

On n'a pas vraiment de projets en parallèle, Helloween est toujours numéro un avant le reste. De quelque manière que ce soit, si Helloween appelle, tu dois être là, c'est la priorité (rires).

J'ai envie qu'on parle un peu de toi, plus précisément, si tu le veux bien. J'aimerais savoir si tu as des compétences inconnues du grand public qui ne soient pas liées à la musique ? J'espère que tu ne m'en voudras de te demander ça ! (rires)

Je suis un super cuisinier ! (rires) J'étais boucher, il y a longtemps ! Je cuisine pour mes amis, je vais pêcher, et ensuite je cuisine mon propre poisson, je fais des super plats de poisson au curry, ou bœuf au curry, j'adore la cuisine asiatique et indienne. J'adore faire ça quand j'ai du temps libre, en fait, j'ai beaucoup fait ça durant la pandémie, d'ailleurs (rires). J'apprécie toujours avoir un bon repas avec mes amis, une bonne bière fraîche, sortir au cinéma, aller dans un bar... Juste sortir tout court !

J'ai également une question un peu bizarre, en préparant cette interview j'ai vu sur la page anglaise Wikipédia que deux livres sur le groupe allaient sortir en 2021, es-tu au courant de ces projets ? Si oui, peux-tu nous en dire plus ?

Je ne suis pas du tout au courant ! Sur Wikipédia tu dis ? Attends, je vais regarder ça moi-même et je vais essayer de trouver l'info, si on sort des livres sur nous, je veux acheter un exemplaire ! (rires) Je vais me renseigner, ça vaut peut-être le coup, au cas où on me repose la question. Si ça se trouve, c'est pour de faux, et juste pour m'inciter à l'écrire moi-même plus tard ! (rires) Maintenant je me sens obligé d'en écrire un ! (rires)

On arrive doucement mais sûrement vers la fin de notre entretien, donc je finirai en te demandant simplement ce que l'on peut te souhaiter, avec Helloween, mais aussi personnellement ? Ou juste un petit mot que tu souhaiterais prononcer ?

Eh bien, puisque nous ne sommes pas exactement les personnes les plus jeunes de la planète, désormais, tu peux nous souhaiter bon courage ! Mais bon, les hommes ne vieillissent jamais vraiment, c'est bien connu (rires). Et sinon, avec Helloween, on est impatients de pouvoir enfin se dégourdir les jambes et de venir jouer dans toutes ces villes pour vous tous, de partager quelques bières ensemble, de jouer pour vous. Il est plus que temps de le faire, il est temps de sortir à nouveau, j'aurais aimé que ce jour arrive demain, mais on va devoir attendre un peu encore, mais ça nous empêchera de venir, envers et contre tout ! (rires)



Le site : https://www.helloween.org/
Aurélie P.Lawless

:: Lien vers la chronique de l'album ::

 

 
 
 
 

Copyright © 2011
All Rights Reserved · Essgraphics